Concurrence des sanctions répressives dans la fonction publique: réflexions sur son admissibilité et ses limites

Concurrencia de sanciones represivas en la función pública: reflexiones sobre su admisibilidad y sus límites

The Accumulation of Sanctions in the Public Service: Reflections on Its Admissibility and Limits

Carlos Trochez Fernández1

1 Diplômé de Master II Droit Public des Affaires Parcours Droit de l'action Publique de l'Université de Poitiers, Poitiers, France. Doctorant contractuel en Droit Public à l'Université de Poitiers, Poitiers, France, rattaché à l'Institut du Droit Public (UR14145) et l'École Doctorale de Droit et Science Politique « Pierre Couvrat » ED88. Courrier-e: carlos.andres.trochez.fernandez@univ-poitiers.fr. Lien ID Orcid: https://orcid.org/0009-0006-9353-2672. Fecha de recepción: 13 de enero de 2024. Fecha de modificación: 12 de abril de 2024. Fecha de aceptación: 7 de mayo de 2024. Para citar el artículo: Trochez Fernández, Carlos, "Concurrence des sanctions répressives dans la fonction publique : réflexions sur son admissibilité et ses limites", Revista digital de Derecho Administrativo, Universidad Externado de Colombia, n.° 32, 2024, pp. 9-34. DOI: https://doi.org/10.18601/21452946.n32.02.


RÉSUMÉ

La mise en œuvre simultanée des poursuites disciplinaires et pénales à l'égard des agents relevant de la fonction publique et l'incidence du principe non bis in idem sur cette concurrence se révèle comme un sujet de discussion permanente depuis la consolidation du droit disciplinaire comme sous-système juridique autonome. L'appréhension de tel principe dans la doctrine publiciste et pénaliste ainsi que dans la jurisprudence tant en France qu'en Colombie s'inscrit dans une inadmissibilité unanime ce qui donne de la latitude à l'application originelle d'autres principes pour pallier la lourdeur du cumul de sanctions disciplinaires et pénales. Le présent article constitue une étude de droit comparé entre les ordonnancements juridiques français et colombien qui mette en exergue les principaux enjeux de la double poursuite et apporte des éléments de réflexion pour conforter les garanties entourant les procédures répressives applicables aux agents publics.

Mots-clés: Non bis in idem, poursuites disciplinaires, poursuites pénales, cumul de sanctions, autorité de la chose jugée, proportionnalité.


RESUMEN

La iniciación simultánea de actuaciones disciplinarias y penales contra servidores públicos y la incidencia del principio non bis in idem sobre esta concurrencia se revela como un tema de discusión permanente desde la consolidación del derecho disciplinario como subsistema jurídico autónomo. La aprehensión de dicho principio en la doctrina publicista y penal, así como en la jurisprudencia, tanto en Francia como en Colombia, se inscribe en una inadmisibilidad unánime, lo cual deja espacio a la aplicación original de otros principios con el objetivo de aminorar la gravedad de la concurrencia de sanciones disciplinarias y penales. El presente artículo constituye un estudio de derecho comparado entre los ordenamientos jurídicos de Francia y Colombia, que pone de relieve los principales retos de la acumulación de actuaciones y ofrece elementos de reflexión para reforzar las garantías de los procesos punitivos contra servidores públicos.

Palabras clave: non bis in idem, actuaciones disciplinarias, actuaciones penales, concurrencia de sanciones, autoridad de la cosa juzgada, proporcionalidad.


ABSTRACT

The debate regarding the simultaneous initiation of disciplinary and criminal proceedings against public servants, and the impact of the non bis in idem principle on the accumulation of these sanctions, has persisted since the establishment of disciplinary law as an independent legal subsystem. The consensus in both public and criminal law doctrine, as well as in French and Colombian jurisprudence, is that this principle is largely considered inadmissible. This shared perspective allows for the original application of alternative principles to mitigate the severity of concurrent disciplinary and criminal sanctions. This article provides a comparative law study between the French and Colombian legal systems, highlighting the primary challenges associated with dual proceedings. It also offers thoughtful considerations aimed at strengthening safeguards within punitive procedures applicable to public servants.

Keywords: Non bis in idem, Disciplinary Proceedings, Criminal Proceedings, Accumulation of Sanctions, Res judicata, Proportionality.


INTRODUCTION

La répression, conçue comme un moyen étatique de rétablissement de la validité de la norme et l'identité constitutive d'une société, représenterait un mécanisme intrinsèquement présent dès lors qu'un système social existe. Au sein de la société qui constitue le système social principal nous allons retrouver des sous-systèmes dont la principale fonction sera de garantir cette validité normative et cette identité sociétale en faisant recours à des moyens symboliquement généralisés comme la peine quant au droit pénal -sous-système pénal- ou la sanction disciplinaire quant au droit disciplinaire -sous-système disciplinaire-, ces sous-systèmes sont appelés à participer cumulativement lorsqu'il s'agit de réprimer des fautes disciplinaires au sein de la fonction publique.

Bien évidemment, ces sous-systèmes ne sont que le produit d'une différenciation fonctionnelle qui permet de maintenir l'intégrité d'un système social général, et c'est sur ce point qu'ils convergent comme une manifestation d'un ius puniendi général, mais en même temps, ils divergeront au niveau de leur spécificité fonctionnelle sous l'angle de finalités et de moyens bien distinctifs. Notre étude se penche en conséquence sur ce niveau pour élucider l'admissibilité et les limites de la concurrence des sanctions dans la fonction publique depuis une perspective comparative entre le droit français et le droit colombien.

Malgré le fait que nous pouvons recenser des dispositifs punitifs convergents dans le cadre de multiples professions, activités ou milieux, la fonction publique nous octroi l'illustration la plus réussie de cet emboitement et de la cohabitation des mécanismes de rétablissement normative au sein des organisations, déjà la loi n.° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires en France établissait ce binôme2 et le Code Générale de la Fonction Publique3 reprend dans des termes similaires la responsabilité disciplinaire et pénale des fonctionnaires publiques. Une grande partie des réflexions concernant le cumul de sanctions punitives, issue du droit de la fonction publique, a irradié les régimes disciplinaires dans d'autres domaines4. Les sanctions disciplinaires dont il s'agit dans le présent article s'entendent d'une prérogative infligée par l'autorité administrative à l'encontre des fonctionnaires publiques et les agents contractuels (dans ses trois versants). Le droit colombien de la fonction publique ne se distancie pas considérablement de cette élaboration française, malgré quelques traits distinctifs. En conséquence, doivent être exclues les règles relatives aux sanctions disciplinaires dans le domaine privé, dans les ordres professionnels, dans les syndicats et, plus largement, dans toutes les communautés d'individus hors l'administration publique.

L'intérêt sur le sujet revêt d'une particulière actualité tant dans l'ordonnancement juridique français que colombien5, d'une part, en France, même si la jurisprudence des sages de la rue de Montpensier6 ainsi que celles des juges du Palais-Royal7 semble confirmer une solution pérenne en matière de cumul de sanctions disciplinaires et pénales, le danger d'une censure éventuelle de la cedh sous l'angle de l'article 4 du protocole n.° 7 hante de façon permanente8 comme ça a été le cas de l'applicabilité du non bis idem en matière de répression boursière-9 et d'autre part, en Colombie la mise en vigueur du nouveau Code Général Disciplinaire10 qui substitue l'ancien Code Unique Disciplinaire11, est l'occasion de se pencher sur les justifications et les limites du cumul de sanctions punitives dans la fonction publique dont la nouvelle codification ne semble pas apporter une solution concrète.

À partir de cette étude comparative qui mobilise un raisonnement en clé fonctionnaliste-systémique nous nous proposons de décortiquer la légitimité de la non-application du non bis idem dans la matière, ses fondements et ses justifications dans les deux ordres juridiques, ainsi que les solutions apportées par la jurisprudence et la doctrine face à la prétendue et absolue indépendance des poursuites et les effets inéquitables de cette conception.

Il conviendra remarquer que les limites au cumul de sanctions répressives prononcées à l'égard des sujets appartenant à la fonction publique sous l'angle du principe de non bis in idem démontre une faible incidence dans la matière en contraste avec d'autres principes comme l'autorité de la chose jugée ou le principe de proportionnalité. Mais, il est pertinent de souligner, que la maniabilité de ces deux derniers principes reste très asymétrique entre la France et la Colombie.

L'autonomie fonctionnelle des répressions concourantes dans la fonction publique se dessine comme la justification d'un traitement sui generis en matière de cumul (i), cependant, cette autonomie se heurte à des limites au titre de certains principes en dehors du non bis idem (ii).

1. L'AUTONOMIE FONCTIONNELLE DES RÉPRESSIONS CONCOURANTES DANS LA FONCTION PUBLIQUE ET SES EFFETS SUR LE NON BIS IDEM

Il conviendrait d'aborder ce sujet dans deux temps pour comprendre la neutralisation du non bis idem dans le cumul de sanctions disciplinaires et pénales et cela passe par étudier le principe de l'indépendance des poursuites qui résiste à toute contestation et qui fonde la non-application du bis in idem dans la matière tout en entraînant des situations juridiques redoutables.

1.1. L'indépendance des poursuites disciplinaires et pénales

Il est possible d'identifier tout au long de la consolidation du droit disciplinaire comme un sous-système juridique autonome que la doctrine a eu du mal à apprécier son contenu fonctionnel en dehors du sous-système pénal. Cela résulte notamment que tant le droit disciplinaire que le droit pénal font recours au moyen de la répression, toutefois, il est temps de concevoir la répression comme un mécanisme général de stabilisation normative découlant de la nécessité connaturelle de tout système social de se préserver et de s'autoproduire12.

Ce mécanisme général est dépourvu du sens symbolique et communicatif a priori puisque ce sens est octroyé par la fonction de sous-système qui en font recours. Le caractère répressif d'une sanction découle d'une fonction essentielle de l'État qui vise à stabiliser les attentes normatives, car le système juridique est un système qui se sert des attentes contrefactuelles dans la reproduction de ses opérations et c'est le caractère normatif de ces attentes contrefactuelles qui lui sert de structure, nonobstant, ce caractère n'implique pas traiter ce qui est substantiellement identique comme fonc-tionnellement identique. Le régime juridique de chaque sanction doit être adapté à la fonction qu'elle remplit dans le réseau de sanctions existant. Ainsi, à titre d'illustration, la fonction manifeste du droit pénal est de stabiliser les attentes normatives à travers la sanction pénale qui est un moyen de communication symboliquement généralisé ayant comme finalité le reproche social des comportements orientés de façon négative à l'identité constitutive de la société. En contraste, la fonction du droit disciplinaire utilise un moyen de communication symboliquement généralisé distinct, celui de la sanction disciplinaire ayant comme finalité la préservation de l'ordre au sein de la fonction publique. Il découle de cette distinction fonctionnelle, une faute avec deux contenus bien différentiés, des restrictions quant aux destinataires de la norme, quant aux attentes normatives stabilisées et quant au contenu de chaque sanction.

Ce débat en France peut être analysé sous l'angle doctrinal, qui s'articule autour d'une approche matérielle ou finaliste et provoque que l'analyse fonctionnaliste reste très isolée, et sous l'angle jurisprudentiel dont son positionnement n'est pas loin de la doctrine (1), en ce qui concerne la Colombie, tant la doctrine que la jurisprudence sembleraient rejoindre dans tous les aspects la conception française de l'indépendance entre ces sous-systèmes (2).

1.1.1. La spécificité fonctionnelle du droit disciplinaire et la spécificité fonctionnelle du droit pénal en droit français

La caractérisation d'une distinction entre l'ordre disciplinaire et l'ordre pénal a été bâtie sous l'égide d'une approche soit matérielle, soit finaliste et elles restent au cœur de la définition de chaque sous-système.

Nous identifions très tôt des définitions doctrinales intégrant cette méthode, Serge Salon, a précisé par exemple que: « Quel que soit son mode d'attribution, l'autorité implique toujours, en vue de la bonne marche de l'association, le pouvoir d'édicter des règles et d'en assurer le respect sous la menace de sanctions. Lorsqu'elle s'exerce à l'égard des membres de la société globale étatique, la répression des manquements aux règles est qualifiée de pénale […] Par contre, lorsque la répression vise uniquement les membres d'une société particulière dont le comportement est jugé de nature à troubler l'ordre qui doit régner au sein de cette société, elle est qualifiée de disciplinaire »13.

Il a été admis que la théorie institutionnaliste de Maurice Hauriou est le base d'une explication théorique assez solide du fondement du droit de punir et de son unité matérielle à l'égard du droit disciplinaire et du droit pénal14, ainsi, tout le phénomène répressif s'explique à travers de la notion d'institution qu'Hauriou conçoit comme « une idée d'œuvre ou d'entreprise qui se réalise et dure juridiquement dans un milieu social; pour la réalisation de cette idée, un pouvoir s'organise qui lui procure des organes; d'autre part, entre les membres du groupe social intéressé à la réalisation de l'idée, il se reproduit des manifestations de communion dirigées par les organes du pouvoir et réglées par des procédures »15, en ce sens, la distinction que nous retrouverons entre droit disciplinaire et droit pénal dans l'institutionnalisme d'Hauriou se concentre sur l'objet de chaque répression, un objet qui réponde à une logique hiérarchique dont l'institution primaire (L'État et sa Constitution) qui s'assimile à la société globale est l'objet de protection par les biais des dispositions pénales, à l'opposé des institutions secondaires, dont nous retrouvons l'administration par exemple, sont protégées par le droit disciplinaire. Cette théorie a comme conséquence une unité matérielle qui se cristallise dans la répression, mais une distinction au niveau de l'objet qui différencie à travers d'un champ général et un champ restreint des destinataires de la norme répressive. Il ressort de ce raisonnement la phrase phare de Hauriou « la répression pénale n'est pas autre chose que la répression disciplinaire de la société globale »16.

Nous ne pouvons qu'être partiellement en désaccord avec cette approche. Comme nous l'avons esquissé brièvement17 la théorie fonctionnaliste systémique a l'attribut de présenter une distinction fonctionnelle plus solide, et qui si pour l'instant, la doctrine majoritaire s'incline pour une distinction d'ordre matériel, le fondement matériel de cette distinction ne peut être que devenir d'une spécificité fonctionnelle de chaque système répressif18.

En revanche, certains auteurs adoptent une approche antinomique du sous-système pénal et disciplinaire, nous pouvons faire mention de Gaston Jèze qui formule par exemple que « la répression disciplinaire des agents publics fautifs et la répression pénale des agents publics délinquants sont deux choses tout à fait différentes. La répression disciplinaire vise l'amélioration du service public, la répression pénale a essentiellement pour objet la punition personnelle de l'agent public délinquant, au nom de l'idée de justice; l'idée d'exemplarité est secondaire, la répression pénale des agents publics délinquants n'a pas pour but l'amélioration du fonctionnement d'un service public »19. En inversant la perspective des institutionnalistes, cet auteur mette en exergue un contenu matériel différencié qui engendre des finalités aussi différenciées. Cette définition est plus conciliable avec notre approche.

Francis Delpéré, pour sa part, propose une définition du droit disciplinaire à travers une délimitation matérielle entre sous-système pénal et sous-système disciplinaire, quant au premier il « a pour objet l'incrimination et la répression par l'État des agissements de nature à créer un trouble dans la société », en contraste, le deuxième se dessine « comme la branche du droit public qui a pour objet l'incrimination et la répression par l'État des agissements de nature à créer des troubles dans cette société particulière qu'est la Fonction Publique »20. Cette présentation française est susceptible d'être contrastée avec la théorie fonctionnaliste systémique allemande construite de la main de Gunther Jakobs, qui en suivant les postulats du sociologue Niklas Luhmann selon qui le droit pénal remplirait une fonction spécifique : « la fonction du droit est étroitement liée aux expectatives. Cette fonction consiste à communiquer des expectatives et de les institutionnaliser à travers cette communication »21, de cette manière Jakobs conçoit la peine comme un moyen symboliquement généralisé qui traduit la stabilisation des expectations normatives de caractère essentiel pour le système social principal22. L'administration, n'étant pas qu'une organisation de ce système ne peut pas qu'organiser un système répressif fonctionnellement différencié, c'est pour cette raison que l'auteur affirme que pour déterminer l'admissibilité ou non du concours de sanctions disciplinaires et pénales il faut « tenir en compte l'importance spéciale pour l'organisation du fait que le sujet ait porté atteinte à la norme, dans ce cas-là la mesure disciplinaire conduirait à une double punition, ou si au contraire, la détermination de la peine ne peut pas saisir l'atteinte à l'organisation, dans cette circonstance, il reste un espace pour la sanction disciplinaire »23.

Cette répression se resserrait en premier lieu à une fonction spécifique, ensuite à une délimitation subjective par rapport au statut du sujet destinataire dans un rôle particulier, celui du fonctionnaire, puis à une délimitation de l'objet lorsque la faute disciplinaire se circonscrit à des agissements dans ce même cadre de la fonction publique et cet enchaînement logique aboutit dans une sanction fonctionnellement différenciée. Comme l'expliquerait un auteur « la répression disciplinaire est caractérisée par le fait qu'elle est liée à la fonction, tant en ce qui concerne la nature du motif qui la provoque (la faute fonctionnelle) que la nature de la sanction (peine fonctionnelle) »24.

Malgré quelques réticences doctrinales à l'égard de la conception de distinction fonctionnelle et l'indépendance ou autonomie du droit disciplinaire et droit pénal25, une large partie de la doctrine est unanime à soutenir ce raisonnement.

La jurisprudence prenant acte de cet accord doctrinal majoritaire, a reconnu cette indépendance, dans des maintes décisions. il serait pertinent de citer l'arrêt du Conseil d'État du 30 juillet 2003, en l'espèce il était question le cumul d'une peine d'emprisonnement assortie de la peine complémentaire de l'interdiction d'exercer des fonctions administratives pendant cinq ans cumulé avec une révocation disciplinaire contre un fonctionnaire au titre de de l'article 66 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État, la Haute Juridiction administrative a décidé que « Considérant que les procédures pénales et disciplinaires engagées à l'occasion d'un acte ou d'un comportement reproché à un fonctionnaire ont des objectifs différents et sont indépendantes l'une de l'autre […] les stipulations de l'article 4 du protocole additionnel n.° 7 à la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales, qui prohibent le fait d'être jugé et condamné deux fois pour les mêmes faits, ne font pas obstacle au prononcé d'une mesure disciplinaire de révocation en application d'une condamnation pénale»26. Cette jurisprudence ayant été confirmée tout au long du temps, à titre d'exemple, dans un arrêt du 21 juin 201327 et un arrêt du 3 septembre 201928 dans lequel le juge administratif a rappelé le principe d'indépendance des procédures disciplinaires et pénales et a établi qu'un maire qui fait l'objet de poursuites pénales peut être révoqué par son administration à titre de sanction disciplinaire indépendamment du stade d'instruction ou jugement de ce fonctionnaire dans le tribunal correctionnel.

Encore plus frappant, il résulte de l'indépendance de ces deux sous-systèmes que le principe de présomption d'innocence ne trouve pas application lorsque les deux procédures sont engagées parallèlement et que l'autorité administrative prononce une sanction sans surseoir à statuer dans l'attente de la décision pénale29.

1.1.2. La spécificité fonctionnelle du droit disciplinaire et la spécificité fonctionnelle du droit pénal en droit colombien

Au niveau doctrinal, les considérations s'inclinent pour caractériser une spécificité fonctionnelle concernant le droit disciplinaire, certains auteurs plaident pour renforcer l'autonomisation du droit disciplinaire par le biais d'une reformulation théorique des catégories disciplinaires30 pour un auteur, l'action disciplinaire est censée « corriger des anomalies causées dans l'exercice de la fonction administrative »31. C'est sous la plume de l'illustre juriste Carlos Arturo Gomez Pavajeau que la spécificité fonctionnelle du droit disciplinaire par rapport au droit pénal s'est construite autour de la notion de « devoir fonctionnel », n'ayant pas une traduction concrète en droit français, et qui constituerait le soustrait juridique de l'infraction et la sanction disciplinaire en contraste à la notion de « bien juridique » qui guide la construction des catégories juridiques pénales32. De façon plus détaillée l'auteur développe sa conception ainsi: « l'infraction pénale repose sur l'atteinte d'une norme objective de valeur comme critère principale de l'atteinte à un bien juridique -antijuridicité matérielle-, l'élément créateur de l'infraction pénale en Colombie est la punition du résultat, en conformité avec l'article 16 de la Constitution » alors que le droit disciplinaire, « qui ne s'occupe pas des intérêts juridiques sous l'égide de la notion « bien juridique », le fondement de l'infraction, c'est l'atteinte substantielle à un devoir fonctionnel »33.

Il convient de préciser qu'à niveau législatif, l'article 5 du Code Général Disciplinaire34 établit les finalités de la sanction disciplinaire tout en les inscrivant dans un contexte particulier et resserré à l'exercice de la fonction publique. De manière générale, cet élément différenciateur n'est pas ignoré ni dans la jurisprudence constitutionnelle ni la jurisprudence administrative en Colombie. Quant à l'appréhension de l'indépendance de ces sous-systèmes la Cour Constitutionnel, a établi cette autonomie tout au long de sa jurisprudence35, dans deux décisions fondatrices36, le juge constitutionnel procède à une analyse de l'identité de cause et d'objet entre les deux systèmes répressifs en concluant que: « lorsqu'une procédure disciplinaire et pénale ont lieu simultanément à l'encontre d'une même personne, sur la base des mêmes faits il n'est pas possible d'affirmer véritablement l'existence d'une identité d'objet ni de cause, car la finalité de chacune de ces procédures diffère, en plus, les biens juridiques protégés sont différents, il en va de même pour l'intérêt juridique qui est objet de protection [...] Dans la procédure disciplinaire à l'encontre des fonctionnaires publiques, le comportement puni repose sur des normes administratives de caractère éthique destinées à protéger l'efficience , l'efficacité et la moralité de l'administration publique, contrairement, les biens juridiques protégés en droit pénal relèvent d'une plus ample portée et relevance sociale ».

Plus récemment, la Cour a précisé que: « concernant les différences entre le droit pénal et le droit disciplinaire sanctionnateur, les décisions C-214 de 1994 et C-406 de 2004 ont établi clairement que l'objectif du droit pénal comporte la protection de l'ordre social collectif avec une finalité rétributive, éventuellement, corrective ou de réinsertion à l'égard du délinquant. D'autre part, le droit disciplinaire sanctionnateur vise à sécuriser la prévalence des valeurs de l'ordre juridique dans la mesure qu'il confie à l'administration la faculté d'imposer à ses fonctionnaires et aux certains particulaires l'observation d'une discipline »37.

Cette distinction fonctionnelle est saisie dans le même sens pour le juge administratif qui dans de nombreuses décisions se rallie à la jurisprudence constitutionnelle38.

1.2. L'inapplicabilité perenne du principe non bis in idem dans la concurrence des poursuites et sanctions disciplinaires et pénales

Comme corollaire de cette approche majoritaire qui prône une différenciation fonctionnelle entre les deux systèmes répressifs, de façon symétrique, la doctrine et la jurisprudence, ont exclu l'invocabilité du principe non bis in idem lorsqu'un même fait déclenche l'action publique et l'action disciplinaire et lorsque celles-ci aboutissent à une sanction. Cette admission du cumul de sanctions punitives est largement acceptée tant dans l'ordonnancement juridique français (1) comme l'ordonnancement juridique colombien (2).

1.2.1. L'admission du cumul à l'aune du principe de nécessité des peines sous l'angle du principe non bis in idem en droit français

La discussion autour l'applicabilité du principe non bis in idem dont son contenu empêche que « nul ne peut être poursuivi et condamné deux fois pour le même fait »39 découle logiquement de sa consécration en droit français par l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ainsi que par le droit communautaire à travers l'article 4 du Protocole n.° 7. Il est habituel d'aborder ce point en s'attardant sur les éléments de détermination de l'applicabilité du non bis in idem face au cumul de sanctions, ces éléments comportent l'identité des parties et des faits, l'identité de cause et l'identité de l'objet.

Bien que l'identité des parties et des faits n'entraîne pas des difficultés majeures, c'est au niveau de l'identité de cause et l'identité de l'objet ou la plupart des discussions se sont concentrées tout en aboutissant dans une quasi-unanimité théorique. La différence de nature entre les fautes disciplinaires et les fautes pénales justifie par elle-seule que la règle ne bis in idem ne fasse pas obstacle au cumul de sanctions correspondantes.

Depuis longtemps, la doctrine s'est accordée pour affirmer que « la possibilité de cumuler les deux actions ne va pas à l'encontre du principe « non bis in idem ». Pour qu'il y ait violation de ce principe, il faut que les diverses actions répressives engagées sur la base de mêmes faits présentent une identité de cause et d'objet. Tel n'est pas le cas »40. Ainsi, des sanctions pénales à coloration disciplinaire attachées à la privation des droits civiques et politiques, l'interdiction à exercer une fonction publique ou une interdiction professionnelle41 sont susceptibles d'être prononcées parallèlement à des sanctions disciplinaires ayant « virtuellement » le même effet juridique, pourtant avec une nature et objet distincts, comme l'exclusion temporaire des fonctions ou la révocation, des sanctions existantes dans l'arsenal répressif de la fonction publique42-43.

Il est évident que l'appréhension de ces éléments par le Conseil constitutionnel à travers de ses décisions ont bâti une jurisprudence plus ou moins stable dont il ressort l'admissibilité du cumul de sanctions punitives à la condition de « respecter le principe de nécessité des délits et des peines, qui implique qu'une même personne ne puisse faire l'objet de plusieurs poursuites susceptibles de conduire à des sanctions de même nature pour les mêmes faits, en application de corps de règles protégeant les mêmes intérêts sociaux ».44 En matière disciplinaire, les sages de la rue Montpensier, ont prononcé plusieurs décisions qui consolident ce cumul45. Le dernier acte de cette jurisprudence se cristallise dans une décision du 201446 dans le cadre d'une QPC portant sur la procédure suivie devant la Cour de discipline budgétaire et financière (CDBF) sur le fondement de l'article L. 314-18 du Code des juridictions financières (CJF) qui précise que les poursuites devant la Cour s'exercent sans préjudice de toute action pénale ou disciplinaire même si, au titre du respect de la proportionnalité, les différentes autorités saisies sont tenues de s'informer. En reprenant la solution consolidée en matière de cumul le Conseil constitutionnel a jugé que l'article L. 314-18 n'était pas « en lui-même » contraire au principe de proportionnalité vu que les autorités juridictionnelles d'une part et les autorités disciplinaires, d'autre part, observent l'exigence de concilier le montant global des sanctions cumulées sans dépasser le montant maximal. Il en découle que la constitutionnalité du cumul de qualifications et de poursuites est confirmée.

Bien avant de la consécration de cette admissibilité en droit constitutionnel, en matière administrative, le Conseil d'État français a statué très tôt de manière favorable au cumul de poursuites47.

Finalement, du point de vue du droit communautaire, malgré l'espoir de voir un infléchissement de cette jurisprudence nationale consolidée par le droit européen, la Cour EDH ne semble pas avoir une volonté d'insérer les sanctions disciplinaires dans la notion autonome de la matière pénale à l'instar des sanctions administratives dans la régulation sectorielle48, bien au contraire, depuis une jurisprudence fondatrice49 les poursuites disciplinaires se sont vues exclues d'une qualification de tel genre, notamment à partir du fait que selon les critères Engel sur la nature de l'infraction et la gravité de la sanction sont difficilement appréhensibles lorsqu'il s'agit d'une sanction disciplinaire. Le dernier acte de cette longue ligne jurisprudentielle, la décision Faller et Steinmetz c. France50, s'inscrit dans la continuité de cette logique.

1.2.2. L'admission du cumul à l'aune du principe stricte de nécessité des peines sous l'angle du principe non bis in idem en droit colombien

La double sanction pénale et administrative dans le domaine de relations de sujétion spéciale comme le droit de la fonction publique en Colombie, semblerait avoir la même approbation doctrinale et jurisprudentielle qu'en France. Sauf quelques avis dissidents, la doctrine suit l'unanimité sur l'inapplicabilité du non bis in idem51. Ainsi dans une étude spécialisée sur ce sujet, un auteur avance que « tant la jurisprudence que la doctrine majoritaire, coïncident dans l'affirmation que l'opérativité du principe non bis in idem dépend fondamentalement de la nature de chaque ordre juridique »52, considérant que la différenciation de nature entre les deux est intrônée à la catégorie de principe juridique plus important que celui de non bis in idem, ce dernier doit être décliné.

Au niveau de la jurisprudence constitutionnelle nous pouvons recenser plusieurs décisions validant le cumul sans que le principe non bis in idem se révèle comme un obstacle53, nous pourrions tirer la conclusion que l'indépendance des poursuites et étroitement liée à la validation du cumul.

2. LES LIMITES À L'AUTONOMIE FONCTIONNELLE DES RÉPRESSIONS CONCOURANTES DANS LA FONCTION PUBLIQUE

Il en résulterait de cette première partie que l'admissibilité du cumul de sanctions disciplinaires et pénales est validée sous l'angle du principe de non bis in idem, malgré cette circonstance, cette admissibilité n'entraînerait pas un régime d'autonomie totale entre les deux systèmes répressifs puisque deux limites apparaissent clairement dans la jurisprudence pour atténuer le caractère excessif ou déséquilibré du cumul. Il s'agit notamment de la chose jugée pénale sur la matérialité des faits (A) et le principe de proportionnalité (B), chacun reçoit un traitement plus ou moins élastique.

2.1. La primauté du droit pénal sur la matérialité des faits et la participation du prévenu

Si l'autorité de la chose jugée pénale en droit pénal paraît s'infiltrer sur l'hermétisme posé par le principe d'indépendance des poursuites permettant ainsi pallier la lourdeur de l'inapplicabilité du non bis in idem dans le cas d'une concurrence de sanctions (1) il faudrait tirer des leçons en droit colombien quand bien même que son rejet absolu manque d'une explication logique (2).

2.1.1. L'autorité de la chose jugée au pénal sur le disciplinaire valide en droit français

Le lien établi majoritairement par la doctrine, selon lequel le principe de non bis in idem et le l'autorité de la chose jugée sont rattachés, ne semble pas être applicable en matière de confluent des sanctions disciplinaires et pénales, puisque si nous avons établi que ce premier principe ne retrouve pas la moindre application pour ce cas, l'autorité de la chose jugée au pénal sur le disciplinaire le retrouve partiellement54.

La doctrine n'objecte pas la prise en compte incidentale de la chose jugée pénale en droit disciplinaire, au contraire, il est établi « que la juridiction disciplinaire ne pourra pas contredire ce que le juge répressif a décidé sur l'existence des faits matériels et la culpabilité au sens pénal »55.

La jurisprudence a établi que lorsqu'un agent public fait l'objet de poursuites pénales, aucune disposition législative ou réglementaire, ni aucun principe général du droit n'oblige pas l'autorité territoriale à surseoir à statuer dans l'attente de la décision pénale56 en étant facultatif57 pour l'autorité disciplinaire, elle « ne s'impose pas aux instances disciplinaires car la répression qu'elles exercent n'est pas, en règle générale, influencée par les vicissitudes de la répression pénale »58.

Pourtant, l'autorité administrative disciplinaire même si elle n'est pas liée par la qualification juridique des faits, « elle est tenue de respecter les constatations relatives à l'existence ou l'inexistence matérielle des faits, ce qui inclut la participation de la personne poursuivie »59 cela ressort d'une jurisprudence administrative bien établie tant sur le plan disciplinaire de la fonction publique60 que sur d'autres formes de répression administrative61.

2.1.2. L'autorité de la chose jugée au pénale sur le disciplinaire rejetée en droit colombien

La jurisprudence administrative colombienne pousse l'autonomie fonctionnelle du droit disciplinaire jusqu'au point d'évincer tout effet juridique de la chose jugée au pénal sur le disciplinaire. L'intérêt du juge administratif une étanchéité opérative totale entre les deux sous-systèmes annule toute communication juridique entre ce qui a été jugé au sein du système pénal et ce qui est jugé ou sera jugé au sein du système disciplinaire. Cela ressort d'une décision du Conseil d'État colombien qui établit que: « le principe de chose jugée n'est pas invocable, si la décision dont elle est fondée a été prononcée dans une procédure de nature différente à celle du disciplinaire, par exemple, dans une décision de caractère pénal, étant donné qu'il n'aurait pas identité de cause, dans la mesure que les fondements et finalités de ces deux juridictions sont complètement distincts. Accepter le raisonnement contraire impliquerait d'accepter qu'en droit disciplinaire il existe une préjudiciabilité d'ordre pénal, et dans ce cas-là, l'autorité qui instruit le procès serait contrainte par les preuves, les jugements et les contenus d'un domaine juridique totalement différent »62.

Dans une autre décision, le Conseil d'État explique que: « les preuves qui ont déterminé l'innocence de l'administré dans la procédure pénale et que selon l'avis du Procureur Général ont donné lieu à une décision d'acquittement pour les infractions poursuivies, n'impliquent pas nécessairement un acquittement en matière disciplinaire, étant donné que le comportement de la personne poursuivi est examiné depuis des optiques différentes »63. Il faut concéder a cette approche jurisprudentielle et doctrinale, qu'elle est en effet, ardue et difficile de démêler et de justifier juridiquement. Cette spécificité colombienne qui ne suit pas la ligne du droit français et qui s'éloigne aussi d'autres ordonnancements juridiques64 qui reconnaissent un effet résiduel à l'autorité de la chose jugée en pénal a des répercussions sur la congruence et la cohérence du système juridique.

Les retombées de cette position jurisprudentielle sur la question du cumul sont majoritairement négatives, contrairement au droit français qui octroie une portée relative à la chose jugée pénale sur les constatations relatives à l'existence ou l'inexistence matérielle des faits, ce qui inclut la participation de la personne poursuivie, en droit colombien, le refus catégorique d'une transmission des effets juridiques alourdit le cumul de sanctions répressives. D'un côté, il n'existe donc obligation pour l'autorité disciplinaire de se plier aux raisonnements modulaires statués par le juge pénal sur la matérialité des faits, ainsi il peut arriver que des décisions contradictoires aient lieu sans que, aussi censurable que cela puisse paraître, nous sommes face à la violation d'aucun principe. Le droit pénal en Colombie n'a aucune prééminence sur le droit disciplinaire.

2.2. Le principe de proportionnalité

Le principe de proportionnalité joue un rôle important sur le plan de contention de l'arbitraire des sanctions et la modération du pouvoir punitif tout en empêchant un caractère superflu ou excessif des sanctions. Il est devenu un élément central tant pour analyser la proportionnalité d'une sanction au sein d'un seul système répressif à l'égard de ses composants fonctionnels comme pour un cumul de sanctions prononcées dans une pluralité de systèmes répressifs, la France a trouvé une solution pour adapter le principe pour le deuxième cas et qui résulte dans une protection plus large (1), toutefois, l'ordonnancement juridique colombien ne donne aucune effectivité à ce principe face au cumul de sanctions (2).

2.2.1. Un cumul limité par le principe de proportionnalité des sanctions en droit français

De longue date, le Conseil Constitutionnel a intégré le principe de proportionnalité comme une limite au cumul de sanctions punitives et plus spécifiquement en matière de concurrence des sanctions disciplinaires et pénales. Le Conseil constitutionnel entend permettre la pluralité des poursuites sous réserve d'une proportionnalité de la double peine. La déclaration de conformité est ainsi régulièrement complétée par un considérant rédigé de la sorte: « qu'il appartient donc aux autorités juridictionnelles et disciplinaires compétentes de veiller au respect de cette exigence »65.

Ce principe a une traduction dans la formulation classique selon laquelle, « lorsque plusieurs sanctions prononcées pour un même fait sont susceptibles de se cumuler, le principe de proportionnalité implique qu'en tout état de cause, le montant global des sanctions éventuellement prononcées ne dépasse pas le montant le plus élevé de l'une des sanctions encourues ; qu'il appartient donc aux autorités juridictionnelles et disciplinaires compétentes de veiller au respect de cette exigence et de tenir compte, lorsqu'elles se prononcent, des sanctions de même nature antérieurement infligées»66. Il se différencie relativement du principe de proportionnalité consacré dans l'arrêt Dahan67 qui permet au juge administratif d'examiner si les faits constituent des fautes de nature à justifier une sanction, ensuite sous l'angle de la gravité de la faute, la proportionnalité de la sanction disciplinaire et objet aussi d'examen. La distinction consiste donc que le principe de proportionnalité de l'arrêt Dahan s'effectue par le prisme de la gravité de la faute et l'équilibre que la sanction prononcée aurait par rapport à cet élément68, c'est un examen d'ordre interne et substantiel, car il se circonscrit au système disciplinaire. A l'inverse du principe de proportionnalité qui intervient en matière de cumul de sanctions, l'examen implique la rencontre de deux systèmes autonomes et il est plutôt d'ordre externe, arithmétique et processuel.

Ce principe est donc appelé aussi à intervenir lorsqu'il s'agit du cumul de sanctions disciplinaires et des sanctions pénales dont la portée est intéressante dans la mesure qu'il neutralise partiellement les effets disproportionnés susceptibles d'un cumul de ce type des sanctions, au moins sur le plan arythmique. À ce titre, le juge procède à établir dans le cadre d'un calcul arithmétique quelle est la sanction la plus élevée entre les deux sanctions parallèles sans que l'addition de celles-là ne dépasse pas le montant de la sanction la plus élevée. Ils demeurent toutefois quelques interrogations lorsque ce principe est convoqué à être appliqué dans en cas de cumul de sanctions de nature différente, nous songeons notamment à la peine d'emprisonnement et d'amende face aux sanctions disciplinaires classiques. Il semblerait provisoirement que le principe de proportionnalité serait d'une difficile application lorsque les sanctions cumulées sont de nature différente.

2.2.2. Un mécanisme absent en droit colombien

Bien que le principe de proportionnalité trouve application en droit disciplinaire colombien et qu'il retrouve un ample développement au sein du droit disciplinaire jusqu'à constituer une limite au prononcé des sanctions disciplinaires, en restreignant l'arbitraire et le discrétionnaire qui peut se présenter dans l'exercice de l'action disciplinaire »69. Ce principe ne semble pas être poussé jusqu'à limiter le cumul de sanctions punitives en matière disciplinaire dans l'ordonnancement juridique colombien.

En suivant le raisonnement de la Cour Constitutionnelle, ce principe « constitue un élément inhérent à toute procédure disciplinaire, cela ne se circonscrit uniquement à l'agissement qui est attendu de la part du sujet, mais aussi à la sanction qui résulte de son inobservation […] ni les règles de conduite, ni les sanctions disciplinaires peuvent s'affranchir des critères de finalité, nécessité et proportionnalité […] elles doivent poursuivre un but constitutionnellement légitime, elles doivent être adéquates et nécessaires pour sa réalisation et garder une stricte correspondance entre l'infraction et la sanction »70.

Le droit colombien semble assigner une portée simple à ce principe, celle de la modération du pouvoir, sans que ni la jurisprudence ni la doctrine s'étaient penchées sur la question de l'équilibre mathématique du cumul de sanctions. Les paramètres de fixation et dosage de la sanction disciplinaire en Colombie, ne tient pas compte, dans l'état actuel du droit, du prononcée simultanée d'une sanction pénale de même nature, en conséquence deux sanctions peuvent se superposer quant à son quantum sans qu'aucune de deux aie une influence sur l'autre.

La seule perspective qui reste ouverte pour diminuer l'excès de la répression cumulée pourrait être le principe d'ultima ratio comme l'envisage un auteur71, ce principe qui traduit l'idéale que le droit pénal et la justice pénale ne doivent intervenir qu'en dernier recours, après les autres modes d'intervention répressive alternative dans la société. Pourtant, des difficultés ressortent de l'application de ce principe dans la mesure qu'il semble s'imposer prioritairement au législateur et pas forcément aux autorités investies d'un pouvoir répressif.

CONCLUSIONS

Au terme de cette étude, nous avons essayé d'illustrer le traitement du cumul de sanctions en matière pénale et en matière disciplinaire sous la perspective d 'une méthodologie du droit comparé entre le système juridique français et colombien. Ce cumul ayant été largement accepté tant en doctrine qu'en jurisprudence72 dans les deux ordonnancements juridiques il apparaissait évident de se questionner sur les fondements et justifications de cette particulière exception à un principe qui bénéficie d'une application stricte, à la limite à l'intérieur de chaque sous-système, toutefois, lorsqu'il s'agit d'une dualité parallèle des poursuites, la force juridique de ce principe s'éteint.

De façon générale, l'analyse a permis de constater que le principe d'indépendance des poursuites disciplinaires et pénales jouit d'une solide acceptation, tout en se fondant dans la spécificité fonctionnelle de chaque sous-système qui se cristallise dans des finalités, buts, moyens et contenu matériels bien fonctionnellement différenciés. Conséquemment, cette réalité résulte dans une totale inapplicabilité du principe non bis in idem en cas de concurrence des sanctions et faute d'opérativité de ce principe, le cumul de poursuites et des sanctions refuse toute remise en question. Et cela serait valable pour le système juridique français et colombien.

Toutefois, il ressort de cette étude aussi que le cumul de sanctions disciplinaires et pénales s'effectue avec totale liberté. Des principes relativement liés au principe de non bis in idem viennent à modérer ce phénomène cumulatif répressif en réduisant le caractère excessif qui en apparence caractérise le cumul. Il s'agit, notamment, du principe de l'autorité de la chose jugée et du principe de proportionnalité, chacun avec un contenu, une fonction et une portée diffèrent, s'articulent dans différentes étapes, préalablement pour l'autorité de la chose jugée pénale qui s'impose au disciplinaire concernant l'existence ou l'inexistence matérielle des faits et la participation de la personne poursuivie traduisant une sorte d'accessorium sequitur principale, et postérieurement, pour le principe de proportionnalité qui exige, en tout état ce cause, face à un cumul que le montant global des sanctions parallèles éventuellement prononcées ne dépasse pas le montant le plus élevé de l'une des sanctions encourues.

Il est important de noter que ces nuances au principe d'indépendance des poursuites ont été consacrées en droit français, sans que le droit colombien connaisse pour l'instant ces évolutions et qu'il serait pertinent de revenir sur les justifications de ce refus de l'extension de ces garanties en droit colombien disciplinaire.

En guise de réflexion prospective, même si cette étude n'a pas été l'occasion pour réfléchir aux évolutions structurelles éventuelles du droit disciplinaire, il conviendrait de se questionner à partir des vicissitudes générées par l'autonomisation du droit disciplinaire par rapport au droit pénal, si l'extension progressive des garanties procédurales et substantielles pourrait aboutir à ce que Leon Duguit augurait en 1903 en affirmant que: « quand l'évolution de la répression disciplinaire sera complète, elle aussi sera juridictionnalisée »73, dans le même sens Bonnard qui vaticinait que: « la répression disciplinaire en arrivera-t-elle au degré complet de juridictionnalisation qu'a atteint la répression pénale ? Malgré la lenteur de l'évolution, rien ne paraît devoir s'y opposer »74. Jusqu'à combien de temps le droit disciplinaire résistera et restera immunisé d'un rapprochement à la matière pénale pour la Cour EDH ? ou si au contraire, la voie de l'autonomisation et la différenciation fonctionnelle se poursuivra ?


NOTES

2 Loi n.° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. Article 29. Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale.
3 Code Général de la Fonction Publique. Article L530-1. Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale. Les dispositions de cet article sont applicables aux agents contractuels.
4 Sans vouloir ériger le droit disciplinaire de la fonction publique comme un droit commun disciplinaire, il faut admettre qu'une grande partie du développement doctrinal et jurisprudentiel en matière du droit disciplinaire; en dépit de l'hétérogénéité des corps concernés, s'est effectué dans ce domaine de la fonction publique. V. Joël Moret-Bailly, Vers un droit commun disciplinaire ?, Saint-Etienne: Publications de l'Université de Saint-Etienne Collection, 2007, pp. 346.
5 Et en général en droit ibéroaméricain, V. par exemple, Lucia Obligado, "La aplicación de los principios del derecho penal al derecho administrativo disciplinario", Revista Jurídica Austral, vol. 3, n.° 2, 2022, pp. 755-794. Cf. Antonio Bueno Armijo, "La responsabilidad disciplinaria de los empleados públicos en Europa. Una propuesta de concepto y de garantías mínimas comunes", Revista General de Derecho Administrativo, n.° 64, 2023, p. 30. Cf. Griselda Anguiano Espinosa, Estudio constitucional del principio non bis in ídem y su aplicación en el procedimiento administrativo sancionador en México, España, Colombia y Perú. Thèse, Université de la Corogne, 2022, pp. 452.
6 Le Conseil Constitutionnel.
7 Le Conseil d'État Français.
8 Les critiques à la jurisprudence de la CEDH qui limite l'application du principe non bis in idem sous l'angle de l'article 4 du protocole n.° 7 à la Convention européenne des droits de l'homme semblent se multiplier de plus en plus, en fracturant la prétendue unanimité sur l'indépendance des poursuites pénales et disciplinaires. Cette jurisprudence qui trouve son fondement depuis longtemps dans la décision CEDH 8 juin 1976, Engel c. Pays-Bas, n.° 5100/71, logique reprise par la décision CEDH 29 sept. 2020, Faller et Steinmetz c. France, req. nos 59389/16 et 59392/16. Voir le remarquable analyse par le prisme du non bis in idem de la summa divisio des sanctions administratives et sanctions pénales en droit français et droit européen fait par Anne-Charlène Bezzina, « L'identité menacée de la règle non bis in idem en droit public français », Revue du droit public, n.° 4, 2015, pp. 945 et ss.
9 Comme l'évoque un auteur, Daniel Landry et Jean Villacèque, « De la distinction du pénal et du disciplinaire », Issu de Gazette du Palais, n.° 346, 2015, p. 17 concernant l'admissibilité de la suspension d'un avocat qui n'a pas été prononcée par le juge pénal et qui peut l'être ultérieurement par le juge disciplinaire, même si une solution classique s'impose, celle de l'indépendance des poursuites, « La question pourrait se renouveler si la peine de suspension était de la « matière pénale » au sens de la CEDH et si le principe non bis in idem était revisité. En matière boursière, ce fut récemment le cas ».
10 Loi 1952 de 2019-Code Générale Disciplinaire.
11 Loi 732 de 2002-Code Unique Disciplinaire.
12 Niklas Luhmann, « Le droit comme système social », Droit et société, n.° 11-12, 1989. André-Jean Arnaud. « Niklas Luhmann autorégulation et sociologie du droit, sous la direction de André-Jean Arnaud », Droit et société, n.° 11-12, 1989, pp. 53-67.
13 Serge Salon. Délinquance et répression disciplinaires dans la fonction publique, Paris : Librairie générale de droit et de jurisprudence, 1969, p. 2.
14 En effet, nous devons cette théorisation au Maurice Hauriou et sa systématisation à l'égard de la répression administrative à Jacques Murgeon dans son ouvrage phare : Jacques Mourgeon, La répression administrative, Sirey : Librairie générale de droit et de jurisprudence,1967, pp. 643.
15 Maurice Hauriou, « la théorie de l'institution et de la fondation (essai de vitalisme social) », Cahiers de la Nouvelle Journée, n.° 4, 1925, pp. 2-45.
16 Maurice Hauriou, Principes du droit public, Paris : Dalloz, 2010, p. 143, (Reprise de Maurice Hauriou, Principes de droit public, Paris : Librairie de la Société du recueil J.-B. Sirey & du journal du palais, 1910), suivie par Jacques Mourgeon, La répression administrative, Thèse, Université de Toulouse, 1966, p. 38 : « Il n'y a aucune raison pour distinguer de façon tanchée la répression pénale (ou judiciaire) de l'une quelconque des répressions dites disciplinaires. Elle n'est que la répression disciplinaire propre à l'institution primaire ».
17 Supra, p. 5.
18 Nous inverserions et complèterions la phrase de Henri Janne, "Fonction et finalité en sociologie", Cahiers Internationaux de Sociologie, vol. 16, 1954, pp. 50-67, qui affirme que « qui dit fonction dit finalité », en réalité il semblerait plus logiquement « qui dit finalité et matérialité dit fonction ».
19 Gaston Jèze. Principes généraux du droit administratif, Paris : Dalloz, 2011, p. 88, V. aussi Roger Merle et André Vitu. Traité de droit criminel, Procédure pénale, Paris : Éditions Cujas, 1979, p. 33.
20 Francis Delpérée. L'élaboration du droit disciplinaire de la Fonction Publique, thèse de doctorat, Paris : Librairie de droit et de jurisprudence, 1969, pp. 21-22. V. aussi Jean-Paul Sudre, "Le principe 'non bis in idem' et le cumul des sanctions pénales et disciplinaires applicables aux notaires", avis sur Civ. ire, 9 avr. 2015, Receuil Dalloz, n.° 20, 2015, p. 1187, pour qui « l'action disciplinaire aurait d'abord pour objet, dans le cadre d'une collectivité restreinte, de contribuer à assurer la prévention des comportements susceptibles de porter atteinte aux valeurs déontologiques de la profession ». V. aussi, René Chapus. Droit administratif général, t. 2, 15e éd., Paris : LGDJ, 2001, p. 346 qui évoque : « le disciplinaire ne tient pas le pénal en l'état. Le pénal ne tient pas le disciplinaire en l'état ».
21 Niklas Luhmann, El derecho en la sociedad, "Das Recht der Gesellschaft", 2003, p. 85 - réssource éléctronique : https://lkservicios.com/maestria-2013-1/descargas/517derecho_luhmann.pdf.
22 Günter Jakobs, Bases para una teoría de derecho penal funcional, Lima: Palestra, 2002, pp 67-68.
23 Gunter Jabkobs, Derecho penal. Parte general. Fundamentos y teoría de la imputación, Madrid: Marcial Pons, 1995, p. 74.
24 Patrice Garant, « Le droit disciplinaire de la fonction publique », Revue Relations industrielles / Industrial Relations, vol. 27, n.° 3, 1972, p. 457.
25 Mathias Latina, « Le principe Non bis in idem ne s'applique pas au cumul de sanctions pénales et disciplinaires », Defrénois, n.° 123, 2016, p. 703, V. aussi François de la Michellerie, « La faute disciplinaire de l'agent public dans l'ombre de la matière pénale », Village de la justice, 2022. Réssource éléctronique : https://www.village-justice.com/articles/faute-disciplinaire-agent-public-dans-ombre-matiere-penale,41947.html.
26 Conseil d'État, 30 juillet 2003, n.° 232238, Publié au Recueil Lebon.
27 Conseil d'État, 5ème / 4ème SSR, 21/06/2013, 345500, Publié au recueil Lebon.
28 Conseil d'État, 3 septembre 2019, M. B, req. n.° 434072.
29 CAA Bordeaux, 25 octobre 2018, n.° 16BX02383.
30 Diego Younes Moreno. Derecho administrativo laboral, Bogotá: Temis, 2005, pp. 540 y ss., V. aussi, José Rory Forero, Manual de derecho disciplinario, Bogotá: Grupo Ecomedios, 2003, pp. 62-63.
31 Gustavo Penagos, El acto administrativo. t. II, 8.ª ed., Bogotá: Doctrina y Ley, 2008, p. 511.
32 Carlos Arturo Gómez Pavajeau, Dogmática del derecho disciplinario, 6.ª ed., Bogotá: Universidad Externado de Colombia, 2017, pp. 61-63.
33 Carlos Arturo Gómez Pavajeau, "El derecho disciplinario como disciplina jurídica autónoma", Revista de Derecho Penal y Criminología, n.° 33, 2012, p. 60.
34 Code Général Disciplinaire, Article 5. Finalités de la sanction disciplinaire. La sanction disciplinaire a une finalité préventive et corrective, afin de garantir l'effectivité des principes et finalités prévus dans la Constitution, la loi et les traités internationaux, qui doivent être observés dans l'exercice de la fonction publique.
35 Cour constitutionnelle, arrêt de constitutionnalité C-856 du 18 octobre 2006, exp. OP-091. Cour constitutionnelle, arrêt de tutelle T-438 de 01-07-1992, exp. 1413, Cour constitutionnelle, arrêt de constitutionnalité C-769 de 10-12-1998, exp. D-2086, Cour constitutionnelle, arrêt de constitutionnalité C-708 de 22-09-1999, exp. D-2329, Cour constitutionnelle, arrêt de constitutionnalité C-155 de 05-03-2002, exp. D-3680, Cour constitutionnelle, arrêt de constitutionnalité C-181 de 12-03-2002, exp. D-3676, Cour constitutionnelle, arrêt de constitutionnalité C-252 de 25-03-2003, exp. D-4180, Cour constitutionnelle, arrêt de constitutionnalité C-948 de 06-11-2002, exp. D-3937 et D-3944 et plus récemment, Cour constitutionnelle, arrêt de tutelle T-350 de 05-052011, exp. T-2903079 y Cour constitutionnelle, arrêt de constitutionnalité C-899 de 30-11-2011, exp. D-8565.
36 Cour Constitutionnel, arrêt de constitutionnalité C-445 de 04-10-1995, exp. D-872 et Cour Constitutionnel, arrêt de constitutionnalité C-244 de 30-05-1996, exp. D-1144. Ce raisonnement est repris postérieurement jusqu'à se stabiliser dans le temps sans modifications importantes. Voir par exemple Cour Constitutionnel, arrêt de constitutionnalité C-181 de 12-03-2002, exp. D-3676 et Cour Constitutionnel, arrêt de constitutionnalité C-818 de 09-08-2005, exp. D-5521.
37 Cour Constitutionnelle, Arrêt de constitutionnalité C-064 de 2021, 18-03-2021, Exp. D-13.802.
38 Conseil d'État colombien, section du contentieux, deuxième chambre, arrêt du 26 septembre de 2019, No de radication (1285-2011), V. aussi Conseil d'État colombien, section du contentieux, deuxième chambre, arrêt du 7 octobre de 2016 No de radication (1751-2011) et Conseil d'État colombien, section du contentieux, deuxième chambre du 4 novembre 2010.
39 Valérie Malabat, « Ne bis in idem et le juge pénal », Revue du droit public et de la science politique en France et à l'étranger, n.° 1, 2018, p. 27.
40 Serge Salon, Délinquance et répression disciplinaires dans la fonction publique, Paris : Librairie générale de droit et de jurisprudence, 1969, p. 36.
41 Cette matière est régulée dans le Code Pénal Français dans les articles 131-26 - 13129.
42 Code Général de la Fonction Publique, Article L533-1 Les sanctions disciplinaires pouvant être infligées aux fonctionnaires sont réparties en quatre groupes :
1° Premier groupe : a) L'avertissement ; b) Le blâme ; c) L'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de trois jours.
2° Deuxième groupe : a) La radiation du tableau d'avancement ; b) L'abaissement d'échelon à l'échelon immédiatement inférieur à celui détenu par le fonctionnaire ; c) L'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de quatre à quinze jours ; d) Le déplacement d'office dans la fonction publique de l'État.
3° Troisième groupe : a) La rétrogradation au grade immédiatement inférieur et à l'échelon correspondant à un indice égal ou, à défaut, immédiatement inférieur à celui afférent à l'échelon détenu par le fonctionnaire ; b) L'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de seize jours à deux ans.
4° Quatrième groupe : a) La mise à la retraite d'office ; b) La révocation.
43 Raymond Odent, Contentieux administratif, t. 2, Paris : Dalloz, rééd. 2007, p. 680 et 681 présente plusieurs cas de cumul de sanctions disciplinaires et sanctions pénales.
44 Cons. const. 7 mai 2020, n.° 2020-838/839 QPC, cette jurisprudence est une confirmation de la décision Cons. const. 30 mars 2017, n.° 2016-621 QPC, D. 2017. 765.
45 Cons. const., décision n.° 2012-266 QPC du 20 juillet 2012, M. Georges R ; Cons. const., décision n.° 2013-341 QPC du 27 septembre 2013, M. Smaïn Q. et autre.
46 Cons. const., n.° 2014-423 QPC décision du 24 oct. 2014, M. Stéphane R. et autres.
47 CE 11 août 1944, Sieur Chaverou, D. 1945, p. 229, CE, sect., 9 juillet 1948, M. Archambault, Rec. p. 323 ; Il en va ainsi alors même que les faits commis par un agent public ont donné lieu à la fois à une action pénale et des poursuites disciplinaires, cf. CE, 19 nov. 1993, No 774235, Lebon et CE, 27 juillet 2009, Ministère de l'Éducation nationale c/Mlle. B. No 313588.
48 La Cour a établi une appréhension très large de la matière pénale, cela l'a amené à insérer dans la matière pénale un nombre considérable de poursuites administratives, c'est le cas notamment des poursuites devant l'Autorité des marchés financiers (CEDH 27 août 2002, Didier c. France, n.° 58188/00, Dalloz jurisprudence) ou devant la Commission bancaire (CEDH 11 juin 2009, Dubus SA c. France, n.° 5242/04, Dalloz actualité, 17 juin 2009, obs. S. Lavric.
49 CEDH 8 juin 1976, Engel c. Pays-Bas, n.° 5100/71.
50 CEDH 29 sept. 2020, Faller et Steinmetz c. France, req. nos 59389/16 et 59392/16 Cons. 42 : « Ceci étant, la Cour rappelle qu'elle considère de longue date que les poursuites disciplinaires ne relèvent pas, comme telles, de la « matière pénale » (voir, notamment, Le Compte, Van Leuven et De Meyere c. Belgique, 23 juin 1981, § 42, série A n o 43, décision Durand c. France précitée, § 56, et Ramos Nunes de Carvalho e Sá, précité, § 123). Plusieurs catégories professionnelles ont été visées : des avocats, des fonctionnaires, des médecins, des liquidateurs judiciaires, des juges et des notaires (voir, précité, Ramos Nunes de Carvalho e Sá, ibidem, § 123, ainsi que les arrêts et décisions auxquels il renvoie). Il peut en aller différemment dans certains cas précis, par exemple, lorsqu'est en jeu une privation de liberté (voir, notamment, précités, Engel et autres, §§ 80-85, et Ramos Nunes de Carvalho e Sá, § 123). ». D'ailleurs, la Cour a affirmé que le fait que des actes susceptibles de conduire à une sanction disciplinaire constituent également des infractions n'est pas suffisant pour considérer qu'une personne responsable selon le droit disciplinaire est « accusée » au sens de la Convention (cela ressort notamment de la décision Müller-Hartburg c. Autriche, n o 47195/06, § 44, 19 février 2013).
51 José Rory Forero Salcedo, Estado constitucional, potestad disciplinaria y relaciones especiales de sujeción, Bogotá: Instituto de Estudios del Ministerio Público, 2007, pp. 194-195.
52 Carlos Arturo Ramírez Vásquez, El principio del non bis in ídem y su incidencia en el derecho penal y disciplinario colombiano, Bogotá: Grupo Editorial Ibáñez, 2007, p. 67.
53 Décision Cour Constitutionnel C-1122 de 12-11-2008 Exp : expediente D-7271.
54 Un auteur aborde la problématique de façon intéressante, tout en mettant en évidence une distinction fonctionnelle entre les deux figures, qui expliquerait avec clarté la portée de cette limitation de la chose jugée au pénal sur le plan de l'action disciplinaire, Juliette Lelieur-Fischer, La règle ne bis in idem. Du principe de l'autorité de la chose jugée au principe d'unicité d'action répressive, Thèse, Université Panthéon Sorbonne, 2005, p. 335, explique que : « Sur le plan théorique, il apparaît que la règle ne bis in idem et le principe de l'autorité de la chose jugée n'ont pas les mêmes fonctions. Tandis qu'il s'agit pour la règle ne bis in idem d'assurer la sécurité juridique de l'individu qui a définitivement répondu de ses actes devant la justice et la sécurité juridique de la collectivité qui aspire à la stabilité des situations juridiques fixées par la justice, le principe de l'autorité de la chose jugée a pour fonction unique la protection de l'autorité du juge aux yeux de la société, l'entretien de son crédit à remplir sa mission : « dire le droit et trancher les litiges ».
55 Jean Pradel, Procédure pénale, 5e éd., Paris : Dalloz, 1990, p. 627.
56 CE, 30 octobre 1996, No 145826.
57 Du fait de la jurisprudence CE, Bonnemaison, op. cit. consid. 3 le juge disciplinaire peut décider de surseoir à statuer lorsque cela paraît utile à la qualité de l'instruction ou à la bonne administration de la justice.
58 Joëlle Pralus-Dupuy, « La répression disciplinaire de l'infraction pénale », Rev. sc. crim., vol. 2, 1992, p 239.
59 Cela ressort d'une jurisprudence du Conseil d'État selon laquelle les procédures disciplinaire et pénale sont indépendantes. Ainsi, l'autorité de la chose jugée au pénal ne s'impose aux autorités administratives qu'en ce qui concerne la constatation matérielle de faits que le juge pénal a retenus et qui sont le support nécessaire de sa décision (cf. C.E., 14 avril 1995, Centre hospitalier de Tourcoing, n.° 116278). V. aussi Joëlle Pralus-Dupuy, op. cit., p. 235.
60 CE 3 mai 1963, Alaux, Rec. Cons. d'EL p. 261, concl. Combarnous, AJDA 1963.352, chron. M. Gentot et J. Fourré ; CE 7 févr. 1958, Ferrandez, Rec. Cons. d'Et. p. 184 ; CE 25 juin 1953, Moizant, Rec. Cons. d'Et. p. 332. V. René Chapus, op. cit. p. 246.
61 CE. 13 oct. 1954, Letoumeur, JCP 1950.11.8890 ; CE. 27 janv. 1955, Pasquelin, Rec Cons. d'Et. p. 154 ; CE 3 janv. 1975, D. 1976.7, note M. Petite ; CE. 7 mars 1980, Cinq-sept et autres, D. 1980.320, note Richer JCP 1981.11.19622, note Y. Brard.
62 Conseil d'État colombien, Arrêt du septembre 26 de 2019, No de radication 2011 -00337/1285-2011.
63 Conseil d'État colombien, Section du contentieux administratif, deuxième chambre, Arrêt du 31 janvier 2002 No de radication (440-99).
64 En Espagne par exemple, l'autorité de la chose jugée bénéficie d'une prévalence, comme l'explique Janeyri Boyer Carrera, "Criterios jurisprudenciales del Tribunal Constitucional sobre el principio non bis in idem", Revista de Derecho Administrativo, n.° 11, 2012, p. 328, « une des règles qu'il faut mettre en exergue, c'est la prévalence de la voie pénale face à l'administratif. Cela se traduit par le fait que dans le cas d'une dualité des poursuites, l'organe administratif restera inexorablement lié à ce que dans le procès pénal a été déclaré comme prouvé au pas prouvé, puisque les faits ne peuvent pas exister pour une autorité et exister pour une autre ». Cela ressort de la jurisprudence classique du Tribunal constitutionnel dans une décision STC 2/2003.
65 Cons. const., décision n.° 2014-423 QPC du 24 octobre 2014, M. Stéphane R. et autres, consid. 37. V. aussi Cons. const., décision n.° 2014-453/453 QPC et 2015-462 QPC du 18 mars 2015, M. John L. et autres.
66 Décision n.° 2014-423 QPC du 24 octobre 2014, M. Stéphane R. et autres (Cour de discipline budgétaire et financière), cons. 35 à 37, considérant repris par exemple dans CC, 18 mars 2015, nos 2014-453/454 QPC et 2015-462 QPC ; CC, 24 juin 2016, n.° 2016-546 QPC.
67 Conseil d'État français, 13 novembre 2013, n.°347704.
68 Comme l'évoque le professeur Jacques Petit dans "La proporcionalidad de las sanciones administrativas", Revista digital de Derecho Administrativo, n.° 22, 2019, p. 389.
69 David Alonso Roa Salguero, "El principio de proporcionalidad: cortapisa al abuso de la potestad disciplinaria", Revista Derecho Penal y Criminología, vol. 35, n.° 99, 2014, p. 155.
70 Cour Constitutionnelle, arrêt de tutelle T-391 de 14-05-2003, exp. T-690264.
71 María-Lourdes Ramírez-Torrado, "Reflexiones acerca del principio de proporcionalidad en el ámbito del derecho administrativo sancionador colombiano", Revista Estudios Socio-Jurídicos, vol. 12, n.° 1, 2010, pp. 155-172.
72 Pour le Conseil d'État français : CE 11 août 1944, Sieur Chaverou, D. 1945, p. 229, CE, sect., 9 juillet 1948, M. Archambault, Rec. p. 323 ; Il en va ainsi alors même que les faits commis par un agent public ont donné lieu à la fois à une action pénale et des poursuites disciplinaires, cf. CE, 19 nov. 1993, No 774235, Lebon et CE, 27 juillet 2009, Ministère de l'Éducation nationale c/Mlle. B. No 313588.
73 Léon Duguit, L'Etat, les gouvernants et les agents, 1903, rééd., Paris: Dalloz, 2005, p. 469.
74 Roger Bonnard, De la Répression disciplinaire des fautes commises par les fonctionnaires publics, Bordeaux : Imprimerie Y. Cadoret, 1903, p. 20.


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