DOI: https://doi.org/10.18601/16577558.n29.08
LA POLITIQUE EXTÉRIEURE DE LA COLOMBIE, Entre l'influence et l'indépendance. Le débat sur le rôle du président et de l'académie de formation des diplomates*
COLOMBIA'S FOREIGN POLICY, Between influence and independence. The debate on the role of the President and the Academy in the training of diplomats
POLITICA EXTERIOR DE COLOMBIA, Entre la influencia y la independencia. El debate sobre el papel del Presidente y la Academia en la formación de diplomáticos.
Héctor Heraldo Rojas Jiménez**
* El presente artículo es un aparte del resumen de la tesis doctoral sustentada el 6 de enero de 2016 en la Université Paris 3 Sorbonne Nouvelle por el autor.
** Ph D. en Sciences Politiques de la Université Sorbonne Nouvelle, Paris III. Docente investigador de la Facultad de Finanzas, Gobierno y Relaciones Internacionales de la Universidad Externado de Colombia. Bogotá (Colombia). [hector.rojas@uexternado.edu.co], [https://orcid.org/0000-0003-1153-318X]
Agradecimientos a la profesora Sylvie Nail y a la traductora Anaïs Delpech por su colaboración en la revisión del texto luego de los comentarios de los pares evaluadores
Recibido: 20 de junio de 2018 / Modificado: 18 de septiembre de 2018 / Aceptado: 1 de octubre de 2018
Para citar este artículo:
Rojas Jiménez, H. H. (2019). La politique extérieure de la Colombie, entre l'influence et l'indépendance. Le débat sur le rôle du président et de l'académie de formation des diplomates. OASIS, 29, pp. 155-174
RÉSUMÉ
Avoir des dirigeants qui ne se préoccupent pas de 1'intérêt de la majorité, mais des leurs, est un fait qui caractérise la Colombie et qui est manifeste à travers la nomination de ses diplomates. En général, ceux qui ont pour habitude de re-présenter le pays ne sont ni les meilleurs, ni les plus qualifiés, mais ce sont les plus proches du pouvoir. Cette situation se traduit par l'exécution d'un travail diplomatique infructueux, dans lequel il n'y a pas de planification à long terme, et qui se limite à la conjoncture présidentielle. La mauvaise image ou le manque de crédibilité dans la capacité de l'État et de ses fonctionnaires, à diriger des processus internationaux, sont le résultat d'un "nanisme auto-imposé", comme réponse à une série d'échecs historiques et à un manque de leadership qui ne contribuent pas au développement du potentiel international du pays. La construction d'une stratégie commune entre de nombreux acteurs liés aux questions internationales, pourrait contribuer à la gestion de la politique étrangère partagée entre influence et indépendance.
Mots-clés : Colombia, Politique Extérieure, Nanisme auto-imposé, discrétion présidentielle.
ABSTRACT
Colombia has been characterized for having rulers who do not seek the benefit of the majority of the population but their own, as evidenced by their appointment of diplomats. In general, those who usually represent the country, are not the best, or the best trained, but those closest to power. This situation translates into the execution of failed diplomatic work, lacking in long-term planning and limited to a particular presidential context. The bad image or the lack of credibility in the capacity of the State and its officials to lead international processes are the result of a «self-imposed dwarfism» in response to a series of historical failures and lack of leadership that do not contribute to the development of the international potential of the country. The construction of a joint strategy among many actors linked to international issues could contribute to management of foreign policy that is torn between influence and independence.
Key words: Colombia, foreign policy, self-imposed dwarfism, presidential margin of discretion -discretionary.
RESUMEN
Colombia se ha caracterizado por tener gobernantes que no buscan el beneficio de las mayorías sino los propios, lo que se evidencia en la designación de sus diplomáticos. En general, quienes suelen representar al país no son los mejores, ni más capacitados, sino los más cercanos al poder. Esta situación se traduce en la ejecución de un trabajo diplomático fallido, donde no hay una planificación a largo plazo, sino que se limita a la coyuntura presidencial. La mala imagen o la falta de credibilidad en la capacidad del Estado y sus funcionarios, para liderar procesos internacionales, son el resultado de un «enanismo autoimpuesto» como respuesta a una serie de fracasos históricos y falta de liderazgo que no aportan al desarrollo del potencial internacional del país. La construcción de una estrategia conjunta entre muchos actores vinculados con los temas internacionales, podría contribuir con la gestión de la política exterior que se debate entre la influencia y la independencia.
Palabras Clave: Colombia, política exterior, enanismo auto-impuesto, discrecionalidad presidencial
« À la confluence des deux océans, s'étendaient 40 000 lieues carrées (un million de km2) que Colomb entrevit à peine lors de son quatrième voyage et qui portent aujourd'hui leur nom : la Colombie » (García, 1995). À ses origines, la Grande Colombie disposait d'un territoire trois fois plus grand que sa superficie actuelle de 1 141 748 km2. Sans être le plus étendu des pays d'Amérique, la Colombie pouvait se vanter de posséder un territoire à la superficie proche de celle de l'Argentine actuelle, supé-rieure à celle du Mexique contemporain et un peu plus importante que la moitié du territoire brésilien. Sa configuration initiale était plus grande que le territoire des treize colonies de l'Union américaine.
La Grande Colombie a juridiquement existé entre 1821 et 1831 : elle était alors formée par la vice-royauté de Nouvelle-Grenade, la Capitainerie générale du Venezuela, le District de Quito et la Province libre de Guayaquil. Elle correspondrait aujourd'hui au cumul des territoires de la République de Colombie, de l'Équateur, du Panama et du Venezuela, non sans exclure d'autres territoires passés aux mains du Brésil, du Pérou et du Nicaragua, suite à des erreurs stratégiques commises par des dirigeants politiques colombiens. Ce manque de discernement stratégique a malheureusement constitué un point commun entre tous les présidents et hauts fonctionnaires de la Colombie. L'absence d'une vision globale, l'incapacité à résoudre le débat entre les modèles fédéraliste et centraliste, ainsi que les tensions régionales entre les différents peuples de la République ont mené à sa dissolution.
La Colombie est un pays au potentiel considérable. Pourtant, il souffre d'un « nanisme auto-imposé », autrement dit, d'un sé-rieux problème d'estime de soi, ce qui se ressent sur la scène internationale. Ses gouvernants et ses dirigeants ne croient pas fermement au potentiel du pays. Pourtant, il existe parfois, de manière fortuite ou non, des situations qui laisseraient croire à une bonne gestion politique du pays. Pendant fort longtemps, aucun auteur de renom international ne s'est attelé à l'étude de la politique étrangère colombienne. De ce fait, Bruce M. Bagley, universitaire nord-américain, en est venu à suggérer que le cas de la Colombie pouvait s'apparenter à un « nanisme auto-imposé » (Bagley, 1982). De son côté, Heraldo Muñoz ajoute, après avoir considéré les atouts qui profitent à la Colombie, que ce pays devrait être une puissance régionale, do-tée d'un pouvoir de négociation comparable à celui du Mexique ou de l'Argentine (Muñoz, 1981, p.23).
Cette croyance en un « nanisme » colombien tire son origine de multiples cicatrices historiques, engendrées tout au long de la construction du pays. Cette situation répond au manque d'intérêt réel des gouvernants, des dirigeants et des fonctionnaires, à qui incombent les problématiques internationales, pour la consolidation d'une stratégie judicieuse, à même de promouvoir la Colombie dans le concert des nations. Autrement dit, la figure du « nanisme auto-imposé » provient du manque de confiance de la Colombie en ses propres capacités. Le pouvoir de négociation colombien pourrait être nettement renforcé si le pays orientait mieux sa politique étrangère et si les décisions gouvernementales étaient prises conformément à une stratégie nationale. Pourtant, certains actes politiques comme le Plan Colombie1 forment ce qui pourrait être désigné comme un réalisme complexe, où « le plus fort » - les États-Unis - s'impose, mais où « le nain » - la Colombie - redéfinit, d'une certaine façon, le rapport de pouvoir, tirant profit pour lui-même, au-delà de l'hé-gémonie étatsunienne, et s'accommodant des intérêts du géant nord-américain.
Les Colombiens ont peu confiance en leurs capacités en tant que pays. Il existe une complexité géopolitique -voire psychologique-, qui entretient une dialectique entre soumission et domination. Cependant, la Colombie a conscience de son importance dans les affaires nord-américaines et certains dirigeants colombiens ont su tirer profit et faire bon usage de la reconnaissance nord-américaine, même s'ils furent peu nombreux.
Depuis l'entrée en vigueur de la Constitution de 1991, les principes idéaux de la Politique étrangère colombienne ont donné lieu à d'importants débats, dont ceux liés au rôle même de la politique étrangère et aux défis rencontrés par le pays, comme la mondialisation et une situation interne en constante évolution. La sélection adéquate et la professionnalisation des diplomates, ainsi que la possibilité d'évaluer leurs résultats, ont depuis toujours suscité de grands débats, et plus encore depuis l'entrée en vigueur de la Constitution actuelle. Cette dernière avait en effet été pensée dans un souffle d'optimisme, ses auteurs la jugeant capable de donner à la Colombie l'impulsion nécessaire pour affronter le nouveau siècle, tant sur le plan national qu'international.
Il existe un consensus entre tous les spécialistes de la Politique étrangère colombienne (PEC): le manque de lignes directrices claires et continues des services extérieurs colombiens, et ce, depuis sa création. Avant d'être une politique d'État, la diplomatie colombienne est avant tout la politique d'un seul homme, celle du président en exercice. Elle est donc entièrement conjoncturelle et dessert uniquement les intérêts présidentiels. Elle souffre de carences notables en matière de cohérence, de pertinence et de prospective, ignorant la réalité nationale et la nécessité de participer aux négociations internationales. Les fonctionnaires ayant participé à l'élaboration et à l'exécution de la PEC n'ont pas une connaissance suffisante des dossiers internationaux et ne sont pas capables de relier les enjeux mondiaux aux intérêts de la nation.
De la même manière, ceux qui conçoivent les politiques le font en se projetant à court terme et selon le contexte du moment. D'aucuns considèrent que la Colombie n'a pas la capacité de décider de sa politique étrangère, car celle-ci se trouve figée sous l'influence des facteurs externes et de la mainmise directe exercée par des puissances supérieures. En effet, les responsables de la politique étrangère ont été « colonisés intellectuellement » (Álvarez, 2003, p.19), ce qui se rapproche de la notion de « nanisme auto-imposé » de B. Bagley.
La personnalisation de la relation entre l'ancien président Uribe et l'ancien président vénézuélien Hugo Chávez a marqué une nouvelle tension dans les relations bilatérales puisque, dès le début, ils ne sont pas parvenus à des accords limitrophes, pas plus qu'ils n'ont réussi à fortifier les échanges pour obtenir des résultats positifs concernant la balance commerciale bilatérale. Finalement, aucun accord de coopération n'a pu être formalisé dans aucun domaine. Cette personnalisation de la politique étrangère s'appuie sur la constitution colombienne qui octroie à l'exécutif une grande liberté dans ses prises de décision, sans établir de limites.
Cependant, Uribe n'a pas été l'exception. Tous les présidents ont adapté la politique étrangère en fonction de leurs besoins. De plus, la nomination des diplomates a été la « caja menor » 2 de l'exécutif pour récompenser, acheter ou occulter des personnalités de la vie publique nationale. De la prise de décisions importantes à la nomination des fonctionnaires de rang inférieur, le rôle du président s'est déplacé, ce qui a engendré une baisse de rigueur dans la sélection, la formation et la promotion des représentants colombiens à l'étranger. Plus encore, il a limité la possibilité d'accentuer la présence de la Colombie dans le monde, ainsi que sa capacité à être une puissance régionale guidée par une Stratégie conjointe de politique extérieure (SCPE).
Ce travail de recherche est théorique, descriptif et analytique. Il a été développé selon les critères instaurés par la recherche qualitative et quantitative dans le domaine des sciences sociales, en facilitant l'établissement d'une méthode scientifique pour aborder et interagir avec l'objet de recherche. La méthodologie de cette thèse est celle offerte par la recherche documentaire, historique et théorique. La finalité est de vérifier l'hypothèse en utilisant des outils hautement qualitatifs et en mettant de côté les formules mathématiques. Différentes analyses liées à des théories sur les relations internationales, telles que des descriptions de l'histoire récente du pays, ont été effectuées. Ces analyses sont complétées par des enquêtes menées auprès d'étudiants universitaires et des entretiens effectués auprès d'anciens ministres, vice-ministres et divers hauts fonctionnaires issus de la carrière diplomatique (tels que d'anciens ambassadeurs et des membres actifs du service extérieur).
Ce document prétend démontrer l'hypothèse suivante : dans la mesure où le système présidentiel en vigueur en Colombie octroie un caractère discrétionnaire au Président, en particulier dans la gestion de la politique étrangère, et particulièrement dans les nominations des agents diplomatiques, les efforts déployés pour sélectionner les diplomates de carrière düment formés à cet effet, évaluer leurs services et améliorer leurs compétences, ne pourront fournir les résultats escomptés que si la formulation de la politique étrangère de la Colombie ne se limite pas aux événements conjoncturels, mais cherche plutôt à se construire en tenant compte de l'intérêt suprême dont les Colombiens pourraient en tirer.
POLITIQUE ÉTRANGÈRE ET NOMINATIONS DANS LE SERVICE EXTÉRIEUR
La question du pouvoir discrétionnaire du président de nommer les diplomates représentant les intérêts de la Colombie a été critiquée à maintes reprises par ceux qui sont ont affaire aux relations internationales et à la politique étrangère en Colombie. En dépit de ce qui précède, l'analyse de la relation entre les nominations au service extérieur en Colombie et les raisons qui ont amené le pouvoir exécutif à prendre de telles décisions n'a jamais été systématiquement développée.
Cela peut co'íncider avec la difficulté à trouver des informations officielles et suffisamment fiables sur le sujet. C'est pour cette raison qu'il a été demandé à la Direction des ressources humaines du ministère des Affaires étrangères (MAE) de mettre à jour les chiffres des responsables des MAE parmi les diplomates de carrière et ceux qui sont soumis à un autre type de contrat. À la date de livraison définitive de cet article, aucune information de ce type n'a été reçue. Cependant, la réponse de l'Association diplomatique et consulaire colombienne a été très diligente et nous a fait part des informations suivantes (Tableau 1) :
Cet article traite de l'importance de privilégier la professionnalisation du service extérieur colombien comme un élément fondamental de sa projection internationale, et en ce sens, comme le mentionne Ardila, « une politique étrangère qui s'inscrit dans le prolongement d'une politique intérieure, reflète plus directement les intérêts d'un pays, ou de secteurs hégémoniques de celui-ci, de manière conjointe ou fragmentée. En d'autres termes, il n'y a pas d'intérêt national, mais une somme d'intérêts en interaction permanente » (Ardila, 2005, p. 354).
Il existe un débat sur l'existence des théories de la politique étrangère, cependant, leur rapprochement avec la théorie des relations internationales suggère que la politique étrangère se nourrit des sources de ces différentes théories. En tout état de cause, cela est courant parmi les théories de politique étrangère qui suggèrent, comme le mentionne Ardila (2005), qu'elles ont pour intérêt commun celui de prolonger les intérêts nationaux dans le contexte international. En pratique, la manière dont les nominations des fonctionnaires colombiens du service extérieur sont décidées, en particulier les nominations et les révocations non motivées, n'est liée à aucun intérêt national et est probablement dépourvue de logique théorique.
Cependant, parmi les quatre propositions de politique étrangère de Gideon Rose (1998), la première, « la théorie de la politique étrangère nationale » pourrait, d'une manière ou d'une autre, se rapprocher de la manière dont la politique étrangère est menée en Colombie, en particulier en raison de l'excès de pouvoirs constitutionnels attribués au sein de la fonction présidentielle. Référence : Titre VII, Chapitres 1 et 8 de la Constitution politique colombienne.
En ce sens, Rose mentionne que la politique étrangère est principalement comprise comme le produit de la dynamique interne d'un pays, telle que l'idéologie politique et économique, le caractère national, les partis politiques et la structure socioéconomique. En ce sens, la dynamique interne en Colombie tend à aborder les faveurs politiques, le clientélisme et les nominations favorisant les intérêts individuels, loin de servir tous les membres de la société. En ce sens, elle pourrait être considérée comme le prolongement de ce qui se passe également à l'intérieur du pays.
Cependant, on suppose que les représentants colombiens à l'étranger devraient chercher à ce que les résultats extérieurs déter-minent les avantages pour le pays, en harmonie avec le système international. En tout état de cause, il existe un écart important entre les différentes théories et la recherche des intérêts particuliers des dirigeants, le manque de vision globale ou la nécessité de payer des faveurs politiques, entre autres.
Les trois variables ci-dessus ne sauraient être liées à un agent particulier. Ce n'est pas un problème des présidents Betancur, Gaviria, Samper, Pastrana, Uribe ou Santos. Un mois après la prise de possession du président Duque, le tableau suivant suggère quelques cas de fonctionnaires n'appartenant pas à la carrière diplomatique (Tableau 2) :
D'autre part, selon le commentaire d'Álvarez, « les études de politique étrangère dans notre pays se sont centrées sur des facteurs autres que l'intérêt national. Dans la majorité des cas, elles ne font que décrire des situations, ou les expliquer en spéculant après la survenance des événements, sans prendre en compte la question centrale de savoir comment l'intérêt national s'en trouve affecté, ou le processus de formation de celui-ci, pour obtenir les consensus nécessaires au niveau interne permettant de mettre en application la politique élaborée, ou de la critiquer, et de politiquement contrôler de manière efficace le travail et les decisions de l'Exécutif à l'échelle internationale » (Álvarez, 2003, p.20). Quoi qu'il en soit, les relations économiques internationales du pays ont pris de l'ampleur et se sont considérablement intensifiées ces cinquante dernières années, d'où l'impératifpour le pays de développer une politique étrangère » (Tirado, 1989, pp. 5-6).
REFLEXIONS ET SUGGESTIONS
Sur une superficie totale de 2 070 408 km2 répartis sur une aire continentale de 1 141 748 km2 et une aire maritime de 928 660 km2, la Colombie est divisée administrativement en 32 départements, 1101 municipalités, 5 districts et 20 corregimientos3 départementaux (Igac, s.f.). Cependant, toutes les décisions passent encore par le pouvoir central, sans que les besoins et les potentiels locaux soient pris en compte, ce qui engendre des politiques erronées. Du fait de la détermination bolivarienne à faire de la Colombie un pays centraliste, et ce, dès son origine, les universités, les entreprises, les hôpitaux, les centres de production et les ressources économiques de toutes les régions sont concentrés à Bogotá, avant d'étre répartis selon les besoins et au prorata des apports de chaque région. Toutefois, beaucoup de ces régions ne parviennent pas à recouvrer leur part de ressources économiques nationales, et ce, au point de ne même pas pouvoir rémunérer leurs fonctionnaires.
Cette situation détermine un manque de proportionnalité congénitale dans la mesure où les régions ont créé des niveaux de dépendance difficiles à résoudre, et ce, d'autant plus qu'actuellement la mondialisation tend à imposer certaines normes. Cela entraíne l'oubli des traditions locales qui sont pourtant la base de l'activité nationale et le ciment qui représente l'orgueil d'un peuple et sa capacité à faire face à la mondialisation, le libre-échange et de nombreux phénomènes sociaux, politiques, culturels, résultant du moment historique vécu.
Une des solutions aux problèmes colombiens pourrait être l'émergence d'un chefde file qui réussirait à avoir en tête la grandeur du territoire, sa diversité, sa complexité ethnique, ses problèmes sociaux, politiques, économiques, sanitaires, d'ordre public, d'infrastructure, de corruption et écologiques, et qui aurait une interprétation précise des phénomènes mondiaux. Une autre solution consisterait à inciter les régions à autoévaluer leurs capacités et à prendre des décisions à partir de leurs enjeux locaux ; elles auraient ainsi plus de possibilités pour faire face à la dynamique de la mondia-lisation. En finir avec la peur des fantômes extérieurs et offrir des biens et des services à la planète permettrait à la population colombienne une plus grande prospérité.
« La politique étrangère colombienne ne saurait s'entendre comme une politique d'État pendant les années du Front national (1958-1974), période durant laquelle l'exercice du pouvoir était partagé entre le parti libéral et le parti conservateur et a été immodérément personnalisé. De la même manière, durant cette période, la politique étrangère colombienne, comme celle de toutes les autres nations du continent, se sont trouvées limitées par la conjoncture mondiale conformément à la doctrine Truman, et poursuivant la ligne pro-nord-américaine héritée de la participation à la Seconde Guerre mondiale, les États alliés ont adopté une politique anticommuniste dans le contexte international » (2009, p.100).
En effet, il faut reconnaítre la faible maturité existante dans la formulation de la politique étrangère colombienne. En considérant les différentes théories sur les relations internationales, on peut reconnaítre avec Mattiesen, qu'en Colombie, il est possible d'avoir une approche systémique, socio-centrique et statocentrique (Matthiesen, 1999, p.43).
Il n'est pas aisé de classer la politique étrangère colombienne de ces dernières an-nées dans une seule et même catégorie. Pour Ernesto Samper, celle-ci est avant tout interdépendante, alors que Andrés Pastrana la qualifierait d'idéaliste ; elle contrasterait ainsi avec le réalisme d'Uribe. Enfin, une approche systémique donnerait des réponses théoriques à la compréhension de la politique étrangère de Santos.
Malgré cela, le postmodernisme a offert une ouverture théorique qui parvient à inclure plusieurs des événements de la politique étrangère colombienne récente. Depuis le postmodernisme, l'autonomie en matière de politique étrangère constitue l'un des plus grands objectifs, définie par Pardo et Tokatlian comme : « La capacité d'un acteur social à maximiser son pouvoir de négociation réel ou potentiel vis-à-vis d'un autre acteur social dans un domaine ou une thématique spécifique, sous réserve de quatre conditions : la possession de certains attributs du pouvoir dans ce ou ces domaine(s) thématique(s) ; l'existence d'intéréts dans un conflit opposant les deux acteurs ; la manifestation d'une volonté concrète d'exercer cette capacité et la reconnaissance consciente des risques impliqués dans l'effort pour indépendantiser son pouvoir décision-nel » (Pardo, 1994).
D'après Pierre Gilhodes, « se demander si un pays comme la Colombie - le troisième d'Amérique latine de par son nombre d'habitants, après le Brésil et le Mexique -, peut développer une politique étrangère, revient à se demander si Bogotá répond aux exigences du monde extérieur ou si le pays peut, ayant défini ses priorités en tant que nation et État, adopter une action propre, en toute autonomie » (Gilhodes, 2002, p.161).
Parler d'autonomie dans le cas colombien implique toutefois d'aborder le concept d'autonomie ambiguë (Ansell-Pearson, 1991, p.282), dans la mesure où il s'agit d'une ap-proche moins orthodoxe de la notion traditionnelle d'autonomie, reconnaissant qu'il existe des visions différentes de l'autonomie, non seulement pour la Colombie, mais aussi pour une grande partie des acteurs du droit international : être pensés autonomes les définit comme quasi indépendants, et dans l'actuelle dynamique mondiale, peut-être qu'aucun État ne sera suffisamment indépendant, quel que soit le scénario.
Pour citer à nouveau Gilhodes : « (…) au fond, on peut dire qu'actuellement les Colombiens savent ce qu'ils veulent et ce qu'ils ne veulent plus être. Ils refusent de voir leur pays associé de manière permanente à lidée du trafic de stupéfiants. Leur pays nest pas un « narco-État » et ils ne sont pas un « narco-peuple ». Plus que n'importe qui, ce sont eux ceux qui paient de leur vie le prix d'une lutte difficile qui les dépasse. Il faut reconnaítre que les stéréotypes sur ce pays qui circulent dans le monde sont déprimants. Tout existe, comme partout ailleurs, mais le trafic de drogues ne résume pas la vie du pays. (…) Dans de nombreux domaines, les Colombiens ont beaucoup à faire pour se faire connaítre du monde, et beaucoup à apprendre et à attendre de lui. C'est une tāche nationale qui va au-de-là de tel ou tel gouvernement, parce qu'il ne s'agit pas d'attendre un miracle, mais d'efforts soutenus. L'insertion croissante de la Colom-bie dans le monde est irréversible. Pourvu que s'effacent ses caractéristiques les plus négatives et se développent d'autres moins connues » (Gilhodes, 2002, p.176).
Au XIXe siècle, les rivalités constantes entre les partis libéral et conservateur, générées par le manque de définition du modèle centraliste ou fédéraliste qui a opposé Bolivar et Santander, ont fait que chaque fois qu'il arrivait au pouvoir, le parti adverse créait une nouvelle constitution, ce qui explique que la Colombie ait eu huit constitutions à ce jour, sans que l'une d'elles puisse représenter un accord unanime des Colombiens sur les sujets fondamentaux alors à l'ordre du jour. La Constitution de 1886, qui a survécu 105 ans, n'a pas été l'exception, mais a permis l'implantation d'un État autoritaire en renforçant le modèle centraliste, en fortifiant l'Église catholique, en limitant le commerce, les libertés individuelles et l'opinion citoyenne. Par conséquent, les réformes amorcées au XXe siècle montrent la préoccupation d'ouvrir des espaces inclusifs de participation, au moyen de la consolidation du régime démocratique et en donnant la possibilité au peuple de contrôler les dirigeants élus.
La Constitution de 1991 est plus démocratique. En reconnaissant la souveraineté populaire, elle permet aux délégués du peuple de convoquer l'Assemblée constituante. La Colombie est un état de droit social, puisque la forme de gouvernement est le régime présidentiel dans lequel le centre du pouvoir politique de l'État s'exerce à travers le président. Cependant, le président n'est pas le seul maítre du pouvoir, puisqu'il existe un système d'autonomie relative des branches du pouvoir public. Le Congrès et le président sont élus au suffrage universel, de sorte qu'ils bénéficient de l'approbation du peuple colombien, ce qui en fait un régime démocratique. Le président a le titre de chef de l'État, chef du Gouvernement, chef de l'Administration publique et chef des Forces armées ; il peut aussi nommer ses ministres et secrétaires d'État qui l'accompagneront durant son mandat.
Conformément à l'article 190 de la Constitution colombienne, « Le président de la République est élu pour une période de quatre ans, par la moitié plus une voix que les citoyens déposent, de manière secrète et directe, à la date et selon les modalités fixées par la loi (…). Si aucun des candidats n'obtient de majorité absolue lors du premier tour, un second tour aura lieu trois semaines après la participation des deux candidats ayant obtenu le plus de voix ; l'élu est celui qui aura obtenu le plus grand nombre de voix. » (Constitution politique, art. 190).
Dans un discours prononcé devant l'Assemblée constituante, César Gaviria a évoqué les velléités ardentes exprimées par le peuple colombien :
« Après plus de 200 ans, il est clair que la séparation des pouvoirs publics n'est pas une garantie suffisante contre les abus, pas plus que l'énumération détaillée des pouvoirs du détenteur de l'autorité. Ce qui manque, c'est d'attribuer aux citoyens et de créer des mécanismes leur permettant d'exercer de manière pacifique, ordonnée et directe par les voies institutionnelles, à tout moment et en tout lieu. C'est précisément ce que fait une Charte des droits et des devoirs comme celle que nous soumettons à l'étude de cette Assemblée : transférer le pouvoir au citoyen ordinaire pour que, lorsqu'il sera traité arbitrairement, celui-ci puisse avoir une autre issue que l'agression, la protestation incendiaire ou la résignation soumise et aliénante. Ce que nous proposons, et ce qui est juste dans une démocratie, c'est que le citoyen puisse se présenter devant un juge, devant le défenseur des droits de l'homme ou devant la juridiction constitutionnelle dirigée par la Cour constitutionnelle (Journal officiel constitutionnel numéro 1, 1991 : 17-18) » (Guzmán, 2011, p.37).
Noam Chomsky, dans « Fear of Democracy », souligne un fragment de l'histoire dans laquelle il reconnaít, avec une fermeté extrême, l'importance d'autonomiser le peuple, en raison de son caractère souverain, pour empêcher l'État d'exerce un pouvoir arbitraire contre lui.
« Un État despotique peut contrôler son ennemi interne au moyen de la force, mais quand l'État perd son arme, d'autres dispositifs sont requis pour empêcher les masses ignorantes de s'immiscer dans les affaires publiques, ce qui ne les regarde pas (…) le problème de « mettre le public à sa place » est passé au premier plan avec ce qu'un historien dénomme « le premier grand éclatement de pensée démocratique dans l'histoire » la révolution anglaise du XVIIe siècle. Cet éveil de la plèbe en général a suscité le problème de savoir comment contenir la menace. Les idées libertaires des démocrates radicaux étaient considérées comme offensantes par les gens respectables. Ces idées favorisaient l'éducation universelle, la garantie des soins de santé et la démocratisation de la loi, ce qui était perçu comme menaçant puisqu'elles cherchaient à soulever la plèbe (…) contre les hommes de grande valeur du royaume afin de les entraíner dans des associations et des combinaisons envers l'un et l'autre (…) contre tous les lords, la bourgeoisie, les ministres, les avocats et les hommes riches et pacifiques (…) redoutables étaient les travailleurs et les prédicateurs itinérants qui en appelaient à la liberté et à la démocratie. (…) il n'y aura jamais de monde juste tant que les lois seront faites pour nous par des hommes et des messieurs qui sont élus dans la peur et ne font que nous opprimer, dans l'ignorance des maux du peuple » (Chomsky, 1997, pp. 342-343).
La Colombie est un pays constitutionnellement présidentialiste qui exploite l'image du président de la République. Les fonctions du président consistent à traiter de sujets ayant trait aux relations internationales et à préserver la sécurité internationale. En plus de cela, le Président peut mettre en place des accords internationaux sur approbation du Congrès.
La Constitution de 1991 propose dans son article 9 que « (… ) les relations extérieures de l'État reposent sur la souveraineté nationale, le respect de l'autodétermination des peuples et la reconnaissance des principes du droit international acceptés par la Colombie. De même, la politique étrangère de la Colombie s'orientera vers l'intégration de l'Amérique latine et des Cara'íbes » (art. 9 de la Constitution politique de 1991).
Dans l'article 189, « Il incombe au Président de la République, en qualité de Chef d'État, chef de gouvernement et Autorité administrative suprême de :
En Colombie, la prise de décisions est orientée par le modèle politique qui régit le pays, c'est-à-dire le régime présidentiel. Ce système consiste en une division du pouvoir étatique en trois branches, exécutive, législative et judiciaire, dans lesquelles chacune assume des fonctions particulières, tout en encourageant la coopération mutuelle, en créant une interdépendance nécessaire au fonctionnement efficace de l'État. Le système présidentiel colombien a établi que, quel que soit le président élu, il sera chef de Gouvernement, c'est-à-dire la personne chargée des objectifs et de la politique intérieure du pays, et simultanément chef de l'État, c'est-à-dire le représentant de la souveraineté du pays à l'étranger chargé, par là même, de la prise des décisions en matière de politique étrangère du pays.
I. LE PRÉSIDENT EN TANT QUE CHEF D'ÉTAT
Le système présidentiel colombien lui conférant la faculté de chef d'État, il est considéré comme le représentant de la souveraineté internationale ; c'est lui qui a le pouvoir de prise de décisions en ce qui concerne la politique étrangère du pays. Cependant, il est évalué non seulement par les membres du gouvernement colombien, mais aussi par des experts en affaires politiques. Ainsi, certains critères ont été établis, à partir desquels la mise en place de la politique étrangère est évaluée. L'un des aspects les plus importants réside dans le fait que le président, lorsqu'il doit agir, doit avoir une idée claire de l'orientation qu'il va donner à la politique à mener et sa conception, pour que, à l'heure de résoudre les problèmes qui affectent le pays, il soit capable de les gérer du mieux possible ; en plus de cela, l'organisation du programme mené par le président est essentielle pour obtenir de bons résultats ; il s'agit donc d'un critère dont il faut aussi tenir en compte dans l'évaluation du travail présidentiel.
II. LE PRÉSIDENT EN TANT QUE CHEF DE GOUVERNEMENT
Le modèle présidentiel ne place pas seulement le président à la tête de l'État, lui donnant, de manière indépendante, le pouvoir décisionnel en matière de politique étrangère du pays, mais aussi à la tête du Gouvernement, de sorte que celui-ci doit agir selon les besoins de la nation en tant que telle, dans le but d'atteindre les objectifs que celui-ci propose de donner au pays en interne. Les décisions qu'il prend sur le plan externe doivent donc strictement être prises à partir de la politique interne, dans la mesure où elles auront des répercussions sur cette dernière et concerneront directement la population.
Un élément supplémentaire de discussion correspond à l'un des jugements les plus déterminants, décisifs et étudiés par Thoreau, dans son essai sur la « Désobéissance civile » où il commence par dire :
« De grand coeur, j'accepte la devise : 'Le meilleur gouvernement est celui qui gouverne le moins' et j'aimerais que celle-ci soit mise en pratique de manière plus rapide et plus systématique. Mais en l'accomplissant, elle se ramène à ceci auquel je crois également, à savoir que 'le meilleur gouvernement est celui qui ne gouverne point' et lorsque les hommes y seront préparés, ce sera ce genre de gouvernement qu'ils auront. Tout gouvernement n'est au mieux qu'une 'mauvaise ressource', mais souvent la plupart des gouvernements, si ce n'est tous parfois, ne se montrent guère utiles. Les nombreuses objections - et elles sont de taille - qu'on avance contre une armée permanente, sont dignes d'intérét et peuvent aussi finalement être alléguées contre un gouvernement en tant qu'institution. L'armée permanente n'est qu'un bras de ce gouvernement permanent. Le gouvernement lui-même - simple intermédiaire choisi par le peuple pour exécuter sa volonté - est tout aussi vulnérable aux abus et aux préjugés avant que le peuple puisse intervenir. Nous avons l'exemple de la guerre actuelle du Mexique, oeuvre d'un groupe relativement restreint d'individus qui se servent du gouvernement établi comme d'un instrument, malgré le fait que le peuple n'aurait pas consenti à cette mesure » (Escales, s.f., p.41).
Considéré comme le père du pacifisme, de l'environnementalisme et de l'anarchisme, Thoreau estime, tout comme plusieurs autres auteurs, qu'il est important que l'État limite son action contre les individus et que l'individu reconnaisse son pouvoir dans la démocratie en agissant légitimement face aux actes arbitraires de ses dirigeants.
Le système présidentiel, bien qu'encadré par les facultés octroyées au président en Colombie, est loin de pouvoir maintenir un équilibre face au pouvoir. L'histoire des dirigeants en Colombie ne cesse de nous rappeler comment leurs administrations n'ont jamais été déterminantes en matière de transformations sociales. Il en va de même pour la politique étrangère. Comme nous l'avons mentionné dans l'introduction et comme nous avons tenté de le prouver au cours de l'élaboration de ce document, l'excès de pouvoir discrétionnaire émanant de la Constitution nationale et reçu par le Président, limite considérablement tout effort visant à structurer une politique étrangère qui ne s'accroche pas aux événements actuels, mais qui a plutôt un regard plus global allant au-delà des périodes de quatre ans et projeté à l'horizon de la dynamique d'interaction entre États que la mondialisation exige.
En limitant les facultés présidentielles de nommer des agents du service extérieur, loin du mérite et des nécessités urgentes de la représentation du pays dans d'autres États, il est fort probable que d'autres stratégies contribueraient à améliorer l'image du pays, attirer les investissements étrangers, promouvoir le tourisme des étrangers en Colombie entre autres, et participeraient in fine au développement et à la prospérité des Colombiens.
Avant de continuer, on se rappellera que Raúl Prebisch et Celso Furtado, depuis la Cepal, à l'époque de la guerre froide, ont développé la notion de dualité centre-périphérie, qui décrivait l'ordre économique mondial conformé par un centre industrialo-hégémonique qui détermine les relations économiques d'inégalité avec une périphérie agricole subordonnée. Selon cette théorie, la relation inégale entre le centre et la périphérie est le plus grand obstacle au développement.
La proposition théorique suggérée dans ces conclusions reprend l'importance du travail local encadré dans l'environnement global, mais identifie les pays dits « périphériques » comme les protagonistes de la nouvelle lecture du contexte mondial, en leur octroyant une reconnaissance très significative, étant donné qu'à travers leur connaissance de soi, ils parviennent à résoudre les réponses aux questions qui avaient été précédemment résolues par d'autres modèles, pays ou académies.
La prémisse fondamentale de cette nou-velle théorie est la translation du centre vers les cultures ancestrales, vers la construction d'un concept de Nation qui, en réalité, appartient aux États, où, tout en gardant la langue, la religion et les coutumes héritées de la conquête, elles s'assimilent de manière à pouvoir construire depuis l'intérieur et à ne pas répéter de manière décontextualisée depuis l'extérieur.
Tous les peuples, dans leur processus d'évolution et de développement, ont parcouru dans l'histoire les chemins qui leur ont permis d'assimiler et de produire ce qui leur convient le mieux. Aucun scénario n'est demeuré statique, mais au contraire, toutes les théories sociales avancent vers la complexité, vers des scénarios dans lesquels l'interaction de variables crée de nouvelles voies et de nouvelles formes qui se rapprochent ou s'éloignent des environnements sociaux, mais qui fonctionneront toujours mieux si une plateforme commune est construite au sein de la société, capable d'inclure ce qui n'a jamais été intériorisé du passé, avec le potentiel géographique, culturel, ancestral, depuis les environnements locaux ; à même de reconnaítre le présent avec toutes les nuances exigées par la mondialisation, dans la recherche d'une approche adaptée au XXIe siècle.
Il est donc nécessaire de faire une lecture de la situation des pays de la périphérie pour les orienter vers le centre, et de cette façon, leur apporter les outils nécessaires pour que leur population tire également profit des avantages que la mondialisation propose, dans un scéna-rio inclusif, digne et plus en accord avec les réalisations historiques de la condition humaine.
Les astuces des deux campagnes les plus fortes au pouvoir détermineraient le destin de la Colombie pour les 4 prochaines années à venir, sans reconnaítre que la possibilité d'exercer à l'échelle internationale doit reposer sur la stabilité interne d'un pays. Avant d'obtenir des positions importantes dans le concert des nations, un scénario de stabilité produit des accords entre acteurs politiques, armés, financiers, productifs, académiques, entre autres, devrait être mis en place. Autrement, la fadeur, résultat d'une défaite sportive, pourrait générer plus de violence que celle qui s'est produite dans le cadre du conflit armé colombien. Comme le disait García Márquez : « Nous avons dans notre cœur le même ressentiment politique et le même oubli historique. Un succès retentissant ou une défaite sportive peut nous coùter autant de morts qu'une catastrophe aérienne. C'est pour cette raison même que nous sommes une société sentimentale où l'expression l'emporte sur la réflexion, l'impétuosité sur la raison, la chaleur humaine sur la méfiance » (García, 1995).
Et cette irrationalité profonde qui nous amène à considérer plus de bénéfices dans l'action individuelle que dans la nécessité urgente de consolider des efforts pour obtenir des résultats au bénéfice du plus grand nombre. Ce n'est pas en vain que les deux candidats, celui en faveur de la guerre et celui en faveur de la paix, ont fait plus d'efforts pour attaquer le prestige de l'autre que pour offrir des propositions viables. Même à l'aube des élections, dans les heures qui ont précédé le jour du scrutin, les critiques à l'égard de l'opposant se poursuivaient.
Les castes politiques ancrées au pouvoir ont couru après l'argent seulement pour se remplir les poches. Le mal qui en découle pour la Colombie peut se traduire par la consolidation d'un système pervers où le football du moment peut s'avérer plus important que le destin de la paix ou de la guerre, du travail pour les Colombiens ou de la vente du pays aux multinationales et aux groupes économiques étrangers. Le « pain et les jeux » habituels ont augmenté l'inconscience, le manque de respect, allant jusqu'à l'indifférence totale.
L'absence de nouveaux chefs de file qui ne soient pas les fils d'un Gómez, d'un Lara, Galán, Gaviria, Pastrana, Santos, Lleras, Uribe, Ospina, López ou d'un tout autre qui m'aurait échappé, est l'éternel poison qui aura empêché Bolivar et Santander de répandre la liberté, l>égalité et la fraternité. Ce sont au contraire des modèles qui ont perpétué le colonialisme qui se sont imposés sans grandes discussions parmi les héritiers créoles d'Espagne ; l'envie de tirer le maximum de profits parmi les immigrants juifs séfarades d'Antioche ; et pour l'immigrant turco-libanais, le commerce de la terre et l'élevage à la fin du xixe siècle, puis la politique, et enfin la parapolitique.
Ceci a mené à la construction d'un pays d'élites régionales, confrontées au seul intérêt d'exploiter les ressources nationales, en marge de ce qui pourrait s'avérer être le mieux pour le pays, mais également activement engagées et préoccupées par le fait de maintenir leurs privilèges et leurs conquêtes.
Il est impératif de rédiger un document qui transcende les mandats présidentiels, qui soit constitué comme une politique d'État, dans le cadre de la mondialisation, mais qui fasse également une lecture méticuleuse du potentiel du pays, de ses possibilités régionales et locales, de son énorme capacité de leadership, de sa situation géostratégique privilégiée, de sa condition inégalable de pays de l'Atlantique, du Pacifique, des Caraïbes, des Andes et de l'Amazonie. Cette formulation conjointe doit rassembler tous les acteurs impliqués dans les relations internationales colombiennes.
Les acteurs devant participer sont le ministère des Affaires étrangères, le Comité consultatif des relations internationales, la Deuxième commission du Congrès, les universités qui étudient des sujets connexes, les ministères qui traitent de sujets liés aux relations internationales, les représentants des régions locales, les unions économiques, les organisations nationales et étrangères de la société civile liées aux questions internationales et bien entendu, la présidence de la République.
À partir de la Stratégie conjointe de politique étrangère (SCPE), il sera possible de :
Dès que la Colombie aura tiré les apprentissages de son instinct et de son histoire, elle sera en mesure d'interpréter sa réalité et elle pourra formuler des politiques qui engendrent « le pays que nous nous sommes refusé » dans le cadre d'une société qui va de l'avant et qui fait face à la dynamique mondiale. Quand ceux qui nous dirigent seront des Colombiens d'essence et d'expérience, et non des Colombiens de naissance et des produits du hasard, alors nous pourrons élaborer des politiques publiques qui conjuguent véritablement nos besoins, nos inquiétudes et nos intérêts dans le temps. Si nous continuons à copier sans faire de lecture de notre environnement et sans comprendre le contexte dans lequel nous sommes, nous continuerons à tourner en rond sans direction et sans avenir (Rojas, 2007, p.89).
NOTAS
1 Le Plan Colombie est un accord gouvernemental entre la Colombie et les États-Unis. Conçu en 1999 entre les présidents Andrés Pastrana Arango et Bill Clinton, il cherche, à travers une revitalisation sociale et économique, à contribuer à mettre fin au conflit armé colombien. Même si son action la plus évidente et la plus conforme aux intérêts états-uniens a été la lutte contre la drogue, la Colombie est parvenue à rediriger les ressources économiques allouées à ce plan vers des domaines relatifs au développement social.
2 Il s'agit de moyens peu orthodoxes consistant en une réserve d>argent liquide destinée à payer des menues dépenses ou à résoudre des problèmes sans avoir à se soumettre aux procédures exigées par la démocratie. Dans le cas de la politique extérieure, on décide, sans aucune règle, qui représentera le pays à l'étranger et un service politique est souvent rendu par la nomination.
3 En Colombie, on emploie le terme de corregimiento pour désigner les populations qui vivent sur un même territoire, mais qui ne forment pas de municipalité.
4 Le cas récent du magistrat Jorge Pretel, ex-président de la Cour constitutionnelle, la dénonciation de quelques législateurs en raison des pressions subies pour en finir avec le Conseil supérieur de la magistrature, ou même l'actuel projet de réforme politique dans la recherche de l'équilibre des pouvoirs, constitue un échantillon déterminant de l'importance de mener à bon terme ces transformations.
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